Lumière s'était réveillée d'une bonne humeur incroyable ce matin-là. Comme pour faire honneur à son nom, elle s'était levée à la même heure que le Soleil, s'était jetée vers la fenêtre pour l'ouvrir en grand et profiter de toutes les sensations que lui offraient Mésoé en ce jour. D'abord, le son. On l'avait presque entendue à travers les vitres mais elle envahissait maintenant toute la chambre : la musique ridiculement joyeuse, presque dégoulinante de positivité provenait d'assez loin et pourtant on ne pouvait plus y échapper dans la ville portuaire. Elle était accompagnée de cris de gamins surexcités dont la jeune fille n'aurait pas pu se moquer vu son état actuel, auxquels répondaient des voix d'adultes tantôt résignées, tantôt énervées - ceux qui refusaient d'emmener leurs enfants puis qui craqueraient inévitablement une ou deux heures plus tard.
Les odeurs se faisaient aussi omniprésentes. Il s'agissait principalement de fragrances sucrées à vous en donner le diabète avant même d'y avoir posé les papilles, mais aussi de matières grasses qui donnaient l'impression que son propre nez suintait le beurre qui arrosait le pop-corn. Il en faudrait bien plus pour écœurer la demoiselle, non seulement trop curieuse de découvrir tous ces drôles d'aliments mais surtout Galarienne, donc habituée à bien d'étrangetés culinaires.

Dépêche-toi, Sirius, ça a commencé !

La blonde s'était enfin décollée du balcon auquel ses mains s'étaient accrochées si fermement que quelques écailles de peintures s'étaient détachées de la barrière métallique pour venir décorer ses petites mimines. Juste le temps de se débarbouiller, d'enfiler une robe et de se démêler la crinière, et voilà que la coordinatrice se tenait plantée devant la porte de sortie, impatiente.

Active-toi aussi, Julio, nous n'avons pas de temps à perdre ! Pas la peine de petit-déjeuner, il y aura à manger là-bas !

L'oiseau blanc émergeait à peine de ses rêves duveteux et on lui criait dessus... allons bon. Il se résolut, s'ébroua et se plaça près de sa maîtresse, encore tout ébouriffé, les yeux cernés. Il bailla même à s'en décrocher le bec. L'humain, lui, mettait trop de temps à se préparer au goût de sa protégée. Suspectant qu'il le fasse volontairement pour la narguer, elle finit par le tirer par le bras de force pour l'emmener dans l'escalier. Il ne faisait aucun doute qu'avec sa force, il aurait pu résister, il suivit par dépit, peut-être, ou pour satisfaire son amie.

Très peu de personnes avaient pris la peine de se lever aux aurores, sachant pertinemment que la fête foraine ne resterait pas qu'un jour et que quelques heures suffisaient à en faire le tour et bien s'amuser, tout en vidant allègrement son porte-monnaie. Lumière avait bien entendu ces arguments, mais n'en avait que faire. Et si, les jours suivants, elle se retrouvait avec une situation urgente l'empêchant d'aller faire du manège ? Et si un ouragan arrivait et détruisait tout ? Et si elle mourrait dans vingt-quatre heures ? Non, elle ne prendrait pas ce genre de risques. Et elle ne repartirait pas tant qu'elle n'en aurait pas pris la décision, pardi !

Pas jaloux de son ouïe et de son odorat, sur le trajet, ses yeux en prirent plein la vue également. Guirlande, loupiottes, lampions, statues géantes au loin et autre décorations multicolores semblaient guider vers la foire comme les ballons d'hélium guident à un anniversaire d'enfant de primaire. La terre promise : un gloubi-boulga de rails colorés assortis de manière douteuse à des chapiteaux bariolés. Les chaussures de la blonde tapaient d'impatience sur le pavé à chacun de ses pas, presque en rythme avec l'orgue de barbarie.

L'arrivée ne déçut pas la blonde. Toutes les sensations présentes avaient été amplifiées une fois sur le champ de bataille de bruits assourdissants, de teintes à s'en détacher la rétine et d'odeurs à vous faire regretter cette grippe de l'hiver dernier. Comme tous les gosses qui l'entouraient, la Galarienne était comme imperméabilisée à cette agression par une couche de naïveté à épreuve des balles en caoutchouc.
Tout la tentait : par quoi commencer ? Les attractions ? les jeux ? Les souvenirs ? Ah ! Oui ! La nourriture ! Le petit groupe n'avait pas eu l'occasion de manger à cause d'elle-même. Si le duo d'aventuriers avait sûrement l'habitude du jeûne et devaient être tout au plus grognons, l'estomac de Earl devait crier famine, à en croire sa tête. A n'en point douter que la Skitty aurait aussi rêver de goûter toutes ces nouvelles saveurs sucrées dans une meilleure assiette que les poubelles de la ville.
Lumière partir en courant sans prévenir : elle avait aperçu un stand tout à son goût : trop criard, de par sa tente autant que ses friandises. La jeune fille prit du temps à se décider, au grand ennui de la vendeuse, sûrement présente uniquement dans le but de valider un stage ou de faire plaisir à papa - donc certainement pas payée, pour finalement porter son choix sur une barbe-à-papa (ça serait pour elle) et un paquet de pop-corn nature (à partager entre les Pokémon). Ses petits bras s'en retrouvaient bien chargés si on prenait en compte son sac à main, ce qui ne la gêna pas compte tenu de la situation. Elle se déchargea sur une petite table de pique-nique, prête à déguster cette étrange confiserie qu'on disait inspirée de Sucroquin (la ressemblance était en effet flagrante). Praline sortit de sa Pokéball et se jeta sur le maïs soufflé avant que son ami Evoli n'ait eu la moindre chance d'y poser l’œil, comme imitant sa maîtresse, qui après quelques hésitations, comprit comment s'attaquer à sa nourriture sans s'y emmêler les cheveux. Quel goût ! Du sucre, uniquement du sucre, du sucre pur. Voilà la recette de la barbe-à-papa. Comment se faisait-il que ce drôle de coton rose soit aussi délicieux malgré la simplicité de sa préparation. Si la blonde se régalait à en oublier combien son petit déjeuner allait lui peser toute la journée, elle n'ignora pas la souffrance de Sirius.

Le pauvre bougre ne devait pas apprécier autant qu'elle cet univers, ou alors il le montrait très mal. Si elle voulait qu'il reste pour l'accompagner, il fallait qu'elle le fasse s'amuser ! Elle aurait pu rester seule, certes, mais quand il y avait tant de monde, elle aimait se savoir en bonne compagnie. De plus, qu'est-ce qu'une fête foraine quand on est seul ?

Sirius, regarde ! Ca devrait te plaire, ça, non ? s'exclama Lumière, pointant de son doigt tout collant de glucides un stand de tir.
Une personne était déjà présente. Parfait, juste de quoi stimuler son esprit de compétition ! C'était comme ça qu'elle voyait le jeune homme. Aventurier, il devrait bien s'amuser à un jeu de chasse, non ? Et puis les garçons, ça aime les armes, c'est bien connu !

La journée débutait à peine que Sirius ces lointains sons festifs sortaient déjà par les yeux de Sirius. (bien que ce ne fut pas l'utilité de cet organe ci que l'ouïe.) Si encore sa protégée n'avait pas laissé tout ouvert. Rien dans la chambre ne s'érigeait entre ces musiques niaises, répétitives et stupidement joyeuse et ses oreilles. Et dire que ce serait pire une fois sur place. Sirius savait que s'il n'avait pas accepté la demande de l'anneau solaire, jamais elle ne lui aurait laissé de répit, elle serait même probablement venue le hanter, plus tard, enfin, ça c'est s'il avait cru aux fantômes.

La bonne nouvelle était la suivante, organiser cette excursion si tôt serait sûrement augure d'une foule réduite. Les mâchoires de Sirius se contractèrent, quel lieu stupide, un lieu qui allait à l'encontre de sa fonction. Comment protéger quelqu'un au milieu de tant de distractions, de stimulus sensoriels et d'une foule ? Il lui faudrait coller la blonde encore plus qu'à l'accoutumée. Il savait pertinemment que s'il relâchait sa vigilance, cette bougresse partirait au gré de ses envies et se perdrait. Etait-il gardien ou nourrice ? Il se le demandait parfois. Malgré les plaintes et la peste qu'exprimait Lumière, Sirius prit le temps de terminer son divin thé avant de se laisser porter par le bras, littéralement.

L'air morne et le regard encore plus plissé qu'à l'accoutumée, le gardien scrutait tout. Il comptait profiter de cette occasion pour juger... étudier le peuple de Salva. Jupiter avançait tranquillement aux côtés de son dresseur, Earl, quant à lui, faisait plus dans le Lumière que dans le Sirius. Le petit sautait et gambadait partout, il marchait au même rythme que la blondinette. Sirius l'avait mis en garde contre la nourriture malsaine des forains, mais il savait bien que ce fut en vain. Le petit tomberait droit dans le panneau, mangerait tout ce que Lumière allait lui donner et finirait sur le dos, pattes en l'air et les yeux emplis de peine à cause de la douleur ventrale. Mais ça, c'était son problème, il était prévenu, il savait à quoi s'en tenir.

Ils arrivèrent au lieu tant exécré par le gardien. Comme il le pensait la place s'affichait vaste, bruyante, odorante et peuplée. Il se méfiait, par ailleurs, de tous ces forains. Leurs réputations les précédaient et Sirius savait bien à quel genre de magouilles ils s'adonnaient. La foule se composait essentiellement d'enfants, plus ou moins jeunes et de leurs parents, plus ou moins aptes à dissimuler leur manque d'entrain. Pendant que Lumière s'adonnait à ses premiers achats, Sirius, prenant garde à ce qu'elle ne l'observe pas, prit trois peluches aux pinces. Il sourit intérieurement de satisfaction, sur cette attraction, il ne se ferait pas arnaquer, il connaissait l'astuce. Sortant rapidement de son contentement, le gardien rangea ses gains dans son sac. Il ne fallait surtout pas que Lumière ne le voit apprécier une attraction où elle le serinerait pendant des jours.

Le gardien fronça les sourcils lorsqu'il remarqua les achats de sa blondinette de compagnie. Que de la saloperie, pour parler vulgairement. Il haussa les épaules, elle aussi était prévenue, l'attaque ventrale serait terrible, surtout pour une personne si peu habituée à consommer ce genre de mauvais mets. Le petit groupe trouva finalement une place assise, la blondinette se désencombra de tout son baratin alimentaire et elle commença à attaquer l'étrange boule de sucre rose. Evoli rejoignit son ancien camarade de crime et ils s'atatquérent, ensemble, à l'autre méfait nutritionnel.

Toutes ces odeurs avaient coupé toute faim à Sirius qui se contenta de consommer de l'eau et quelques baies, pour la forme, rangées dans son sac. Il en profita pour sortir une des peluches qu'il remporta et vint la poser sur la table, à l'égard de Lumière:

-J'ai essayé une de ces machines afin de vérifier qu'il était possible de gagner, au cas où tu voudrais t'y essayer, et j'ai pris ça. Je te l'offre, Lulu.

De plutôt bonne facture pour l'endroit où il l'avait prise, la peluche representait un Givrali, un pokémon que Sirius connaissait assez bien. Le gardien reprit, sur un ton pédagogue:

-Il s'agit de Givrali, une des possibles évolutions d'Evoli. Celle de type glace.

Il offrit quelques baies à Jupiter ainsi que de l'eau. Earl signifia de la tête qu'il ne voulait pas de baies, ni d'eau. Grave erreur, mais ça, il le remarquerait plus tard. La voix de Lumière attira l'attention du gardien, puis son doigt. Sirius observa et réfléchit quelques secondes. Pourquoi pas, le tir n'était pas une activité qu'il détestait puis il ne ferait de mal à personne en tirant sur des pancartes ou des cibles en papier. Le gardien se leva, empoigna son sac et dirigea vers le stand, sa protégée au bras. Il prit garde à ce qu'elle ne touche pas sa chemise avec sa bombe sucrée car il refusait de sentir la barbe-à-papa et d'être collant comme un forain puis ils se déplacèrent au stand situé à proximité. Il fixa longuement le stand puis celui qui s'en occupait. Ce type ne lui inspirait pas confiance mais il ne lui inspirait pas autant de dégoûts que certains autres qu'il aurait pu croiser ailleurs. Au pire, il serait armé. Sans plus de concessions, le gardien prit la parole, un air plein de défi à l'encontre de la jeune femme déjà présente au stand:

-Je vous propose un duel mademoiselle. Le gagnant profite de la victoire et le perdant paye la participation des deux autres. J'ai par ailleurs un lot secret à vous offrir si vous me battez.

Sirius s'empara d'une des armes disponibles et il l'ouvrit d'un grand coup sur le canon. Il s'exprima encore, à l'égard du forain, cette fois-ci:

-Quant à vous, j'espère que votre attraction n'est point trafiquée. Je serais armé et je sais viser, prenez garde.

Une courte pause et un long regard pressent puis il conclut:

-Il s'agissait bien entendu d'une blague, pas d'une menace.

A qui voulait-il faire croire ça ? Aux moins aguerris et à ceux qui ne le connaissaient pas, probablement. Si ce stand lui semblait honnête, peut-être que Sirius accepterait d'y dépenser quelques pièces supplémentaires pour enseigner à sa protégée les rudiments du tir.

A peine eut-elle fini sa phrase que Sirius débarqua de nulle-part. Lumière sursauta. Absorbée par sa barbe-à-papa, elle n'avais même pas remarqué que son compagnon s'était éclipsé. Sans que la jeune fille n'ait eu le temps de lui demander où il était passé, surprise et confuse, il posa sur la table l'artéfact répondant à sa question. Il avait profité de la diversion crée par le goûter sucré pour aller faire joujou avec les machines à pinces, enfin, comme il le présentait, "essayé", par curiosité.
La Galarienne observa l'objet qui la regardait dans le blanc des yeux. Il s'agissait d'une poupée, haute d'une vingtaine de centimètres tout au plus. Elle représentait un Pokémon assis, bleu, presque blanc, aux grands yeux brillants, aux longues oreilles et dont la tête était ornée de ce qui ressemblait à des pierres précieuses, se terminant en de longs rubans semblables à une deuxième paire d'ouïes. Il semblait familier à la coordinatrice, ce qui s'expliqua lorsque l'homme à la chevelure grise lui donna une leçon rapide. C'était donc un Givrali, une créature qu'elle connaissait un peu puisqu'il y en avait dans sa région natale, bien qu'elle n'en ait vu en vrai qu'à de rares occasions, et sa dernière lecture d'un livre à son sujet remontait à longtemps. Entendant son affiliation avec Evoli, elle baissa les yeux pour observer Earl, l'estomac rempli et ravi. Il était vrai qu'il y avait une certaine ressemblance, dans la bouille toute ronde et les grandes mirettes pleines d'étoiles. Mais elle savait déjà que le renard brun évoluerait en une toute autre bête.

Eh bien, merci beaucoup, c'est très gentil de ta part... balbutia Lumière, rougissant un peu de cette gentille attention, Mais ne crois pas que je ne t'ai pas entendu m'appeler "Lulu", je laisse couler pour cette fois parce que tu as été très aimable, mentit la blonde, que ce surnom ne gênait pas tant que ça, mais qui la déstabilisait de la part de son gardien, qui avait d'habitude d'un langage si soutenu.

Une fois sa petite leçon terminé, il s'approcha du stand de jeu que lui avait montré la demoiselle, auquel une autre fille aux cheveux blancs s'apprêtait à tirer. Elle fut interrompue lorsque le nouvel arrivant lui proposa un jeu. Cela n'étonna pas vraiment la dresseuse au Palarticho, elle s'y était même attendue. En revanche, elle put remarquer une formation plus que bancale. Avec de tels mots, il aurait été aisé de croire à une tentative pathétique de drague, ce qui n'était évidemment pas le cas. En tout cas, il n'y avait pas intérêt. Elle n'avait pas tiré son ami ici pour qu'il vienne folâtrer avec les minettes.
Apparemment, à son air gêné, la tireuse avait compris les intentions de son potentiel rival de travers, confirmant à Lumière que ce n'était pas que son manque de convention sociales qui lui avait fait interpréter les dires du garçon autrement. Parfois, il ne valait pas mieux qu'elle dans ses conversations. Ça devait être son humour "spécial". On disait souvent que les Galariens avaient un humour auquel toutes les autres régions étaient imperméables. Le forain lui-même eut un instant de recul lorsque son client menaça sans réelles intentions de mal viser s'il l'arnaquait. Bien que s'excusant de sa blague, celle-ci ne fit pas davantage rire le dindon de la farce.

Il était évident que le pauvre bougre aurait besoin d'un soutien moral après le vent monumental qu'il s'était pris de la part de la Salvienne. Lumière se leva et fit un court détour le temps de jeter le bâton qui avait autrefois tenu en place la boule de sucre, prenant soin de lécher ses doigts avant de se les coller partout à cause de la couche saccarine qui à était encore accrochée (il n'était pas question qu'elle doive subir des mèches toutes graisseuses toute la journée).
Le temps qu'elle arrive, la jeune femme à la peau basanée avait déjà tiré sur un ballon, avec brio. Sirius se réjouissait-il d'avoir été rejeté pour un duel à cet instant ? Chance du débutant ou vrai talent, un regard extérieur n'aurait pas pu le déterminer. La blondine s'approcha de son gardien, prenant ses meilleurs faux airs colériques.

Alors, "Sisi", je regarde ailleurs cinq minutes et tu es déjà fourré avec une autre fille ? Goujat, va ! Tu devrais avoir honte !

Lumière n'avait pas le talent de son camarade pour être pince-sans-rire. On voyait facilement son sourire en coin et son teint rougissant à l'idée de mentir. Elle espéra néanmoins réussir à piéger le Galarien, au pire le faire rire. Elle continua, à l'attention de la joueuse :

Je tiens à m'excuser si mon partenaire vous a importunée. Je pense qu'il vous doit au moins une cartouche en dédommagement. N'est-ce pas, Sirius ? finit-elle à l'égard, cette fois-ci du dresseur.
En attendant une réponse, du moins une réaction, elle continua d'observer la demoiselle en joue. Elle serait presque tentée de faire une partie aussi, mais elle craignait que ses bras ne soient trop fragiles pour tenir le fusil sans perdre l'équilibre.

Nullement agacé ou même déçu par le refus de l'inconnue, Sirius se contenta de rester impassible. Il comprenait bien qu'il pouvait être effrayant de s'imaginer dans un duel contre lui, même si cela impliquait des carabines à plombs contre des ballons. Après tout, quelle autre raison que la crainte pouvait ainsi faire begayer une personne ?

Le soucis serait pour plus tard, quand Sirius proposerait à Lumière d'apprendre à tirer. Jamais elle n'accepterait un duel contre lui, alors qu'elle aurait pu approuver face à l'autre demoiselle. Sirius arma sa carabine, elle était vraiment très légère, puis il pointa sa cage à ballons, prêt à faire s'abattre des lances de plombs sur ces pauvres colorés emplis d'helium. Prêt à appuyer sur la gâchette, la voix de Lumière détourna son attention et il annula son tir, relâchant sa concentration et faisant descendre son arme le long de son corps, une habitude qu'il prit lorsqu'on lui enseigna le tir. Le regard tourné vers son acolyte, Sirius répliqua à sa pique d'humour, ça faisait beaucoup d'armes dans un contexte festif, mais rien d'étonnant, chez des forains.

-Je ne suis point fourré, ma chère Lulu. Je me disais simplement qu'une fourrure argentée pouvait s'avérer plus agréable à l’œil qu'un pelage d'or.

Aveu de préférence ou simple poursuite de blague, Sirius ne laissa aucun temps de répit à Lumière pour y réfléchir, puisqu'il enchaîna, retournant l'inexpérience de sa comparse à son avantage:

-Il est plus honteux de rater sa blague en ne sachant retenir son sourire que de proposer un duel à des inconnues, ma petite apprentie.

Il vint coller son index sur son front avant de fermer les yeux et de les rouvrir pour légèrement toiser sa petite protégée, un sourire narquois légérement né sur la bouche:

-On affiche sa satisfaction seulement lorsque l'on est sûr d'avoir touché son adversaire, je t'apprendrais, chère élève.

Puis, sans plus de mots, il se remit en position de tir et creva un des ballons. La seconde phrase de Lumière fit stopper à nouveau le gardien. Il voulu soupirer, pourquoi, en plus de le forcer à venir dans ce lieu bruyant, ne pouvait-on pas le laisser "s'amuser" en paix ?

-Je ne pense point avoir importuné quiconque. Mais soit, si ma petite Lulu veut vous offrir une cartouche, prenez la, jeune femme.

Sirius recula d'un pas et vint poser la carabine dans les bras de Lumière avant de reprendre:

-Je n'aurais point eu besoin de tant de munitions pour percer toutes ces baudruches. A toi d'essayer, Lumière, je suis sûr que tu vas t'en sortir comme une vraie tireuse d'élite.

Le gardien recula d'un autre pas. Il se trouvait entre les deux femmes, bien que son attention fut grandement portée sur Lumière plus que la demoiselle à fourrure argentée. Il ne comptait rien dire à Lumière pour l'instant, l'apprentissage par l'instinct et par la curiosité pouvait s'avérer très efficace pour certains domaines. La foule continuait à se presser dans les allées bondées. Sirius fut presque soulagé d'être arrêté à un stand. Là, au moins, ils n'étaient pas trop à l'étroit. De plus, garder un oeil sur sa protégée devenait une tâche bien plus aisée.