Tales of Salva

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Would I do it again ? ▬ Nans
Andrea Saadauri
Andrea Saadauri
Pas de compétences
Would I do it again ? ▬ Nans  Miniature_677_XYWould I do it again ? ▬ Nans  Miniature_774_Orange_SL
Pokédollars : 61
Would I do it again ? ▬ Nans  Miniature_Badge_Roche_RFVF
Inventaire : - 1 Pokéball
- 2 Potions
- 1 Total Soin
Would I do it again ? ▬ Nans  Miniature_Badge_Roche_RFVF
Andrea Saadauri
Étudiant en Astrophysique
Mer 24 Juin - 20:50   



Nans Kahil

Nom :
Kahil

Prénom :
Nans

Age :
29 ans

Orientation :
Hétérosexuel

Région natale :
Salva

Origines :
Austrée (Woestan)

Activité :
Escort (et plus) + Contrebandier chez les Queen.

Lieu actuel :
Woestan (et partout où il y a affaire)

Avatar :
Kassim - MAGI

Équipe Pokémon :

Au fil de ses aventures et surtout de ses mésaventures, Nans n'a pas eu l'occasion de se lier d'amitié avec un Pokémon. Mais sans doute n'est-ce pas seulement une question de hasard ou de manque de temps. L'Austréen n'a jamais éprouvé le besoin d'être accompagné d'une quelconque créature. Comme il l'a souvent expliqué lui-même, il a assez de s'occuper de lui sans s'embarrasser d'un compagnon à soigner et nourrir.
C'est une question de logique et de pratique, tout simplement… Et même si dans ce monde se déplacer sans Pokémon est chose dangereuse, Nans a appris à se débrouiller tout seul et s'en porte très bien.

Pour autant, l'escort ne déteste pas ces jolies petites créatures qui peuplent sa région chérie – terme tout à fait ironique –. Ce sont peut-être même les seuls êtres vivants qui ont su le faire rire et le réconforter dans les moments difficiles.
Ses années d'errance dans les rues de Woestan puis de Solem lui ont permis de faire connaissance avec une tribu de Rattata et quelques Chacripans tout à fait sympathiques. Certains allaient même voler de la nourriture pour lui : sans les Pokémon, Nans ne serait peut-être pas le même… Aurait-il perdu son humanité ? Aurait-il oublié comment sourire ? Possible. C'est en tout cas ce qu'il lui arrive de penser.

Il fut un temps où le jeune homme ne s'est pas senti plus précieux qu'un pauvre Poichigeon coursé par les gamins de Solem… À une différence près : tout le monde, ou presque, l'ignorait. Quelque part… C'était peut-être mieux comme ça. Dans la misère, on n'apprécie pas être dérangé. La solitude qui le touchait, les sourires qui manquaient, l'attention absente étaient devenu son quotidien. Lui adresser la parole, s'intéresser à lui serait venu à l'inquiéter.

Les deux ans passés dans un élevage de Rykaarde lui ont aussi permis d'apprendre à s'occuper d'autres êtres vivants que lui-même. Une douceur constante dont il était bien incapable – il faut dire qu'on ne lui avait jamais accordé ce privilège –, une fermeté toute mesurée, une patience à toute épreuve, la communication sans mots… Voilà ce que cette expérience lui avait apporté. Un apprentissage qu'il garde dans son cœur et sa mémoire comme les personnes qu'il a rencontrées là-bas.

Décidément, les Pokémon, que ce soit par leur contact peut-être plus humain que les Hommes eux-même ou l'emploi qu'ils lui ont offert, lui ont apporté beaucoup ; c'est une certitude.

Inventaire :

En cours

Qui es-tu ?

CARACTÈRE - En cours
PHYSIQUE - Regarde-toi. Que t'arrive-t-il ? Trop maigre. Déjà que tu es grand… On dirait un spectre, maintenant. Tu crois que c'est comme ça que tu vas attirer les clientes ? Je te l'ai déjà dit : si tu continues sur ce chemin, je ne vais pas pouvoir te garder, et ce sera entièrement de ta faute. Ce n'est pas comme si je ne t'avais jamais prévenu.

Deux doigts qui cherchent leur drogue ; un geste devenu habituel. Le bruit sourd de la déglutition, difficile. Nans avait toujours détesté prendre ces gellules. L'impression d'être dépendant à un médicament. Sans lui, il ne tiendrait pas longtemps. Sans lui, il serait sans doute sur un lit d'hôpital à souffrir le martyre… Les médecins préfèrent voir leurs clients en vie, et de préférence en bonne santé. Lui, dans son tête à tête quotidien, dans cet entretien permanent avec lui-même, ne trouvait aucun intérêt à cette politique de vie et non de mort. Ne devrait-il pas se laisser aller ? Tout jeter à la poubelle, se dire : aujourd'hui, je veux mourir.

Il fallait bien avouer que c'était une phrase qui avait déjà résonné de nombreuses fois dans son esprit torturé par les années d'errance, de deal, de prostitution.
Même quand on est fort, la vie finit toujours par nous rattraper. Par nous rappeler qu'elle est plus solide, plus terrible encore que le pire des Hommes. Ce n'est certainement pas nous, petits parasites que nous sommes, qui allons lui apprendre quelque chose.

Je veux mourir. C'est quelque chose que les gens pensent à tort, sans même comprendre toute l'étendue de ce désir capricieux. Ce n'est que lorsqu'on est confronté à la faucheuse, épée de Dimoclès pressée de s'abattre, qu'on comprend toute la profondeur d'une telle déclaration.
Nans avait fait son petit bonhomme de chemin. Il avait un jour voulu disparaître, un autre jour trouvé bon de vivre encore quelques temps pour prendre sa revanche. Pensées disparates, dilemme cornélien.
Aujourd'hui, il pouvait se dire : tout tient dans cette boîte. Tout réside dans ces gellules. Mon salut est ici. Si je le rejette, je connaitrai les circonstances de ma mort prochaine. Et quelles circonstances ! Il avait pu voir des images… Les corps émaciés, les visages déformés, devenus squelettes avant l'heure. Pas d'âge pour mourir. Pas de règle non plus.
La vie et la mort sont des jumelles terribles ; elles s'amusent. Elles se rient des Hommes et les agitent comme des pantins.

Nans, en découvrant cette finalité qui aurait pu être la sienne, avait pris peur. On avait pu lui parler de cette maladie… Mais avant d'être touché, il n'est pas rare d'envisager le danger comme moins létal qu'il ne l'est vraiment. Orgueil humain.
Le SIDA ? Bah. C'était de l'histoire ancienne. Un virus contrôlé, éradiqué. Plus de quoi s'inquiéter. Plus de quoi s'alarmer.
Erreur fatale.

La maladie s'était déjà bien installée lorsque le jeune homme s'en était rendu compte. Telle une bombe à retardement, elle s'était immiscée dans chaque recoin de son corps et l'avait affaibli dans l'ombre. Défenses immunitaires réduites : danger imminent.
D'abord, il avait maigri, sans savoir pourquoi. Une maigreur malade qui ne lui avait pourtant pas mis la puce à l'oreille. Il venait de subir un choc psychologique ; c'était une réaction normale.
Ensuite, des nausées étaient venues s'immiscer dans sa vie quotidienne… Signes avant-coureur de quelque chose de grave. La maladie se formait en silence, prête à éclater.

Premier virus opportuniste. Un coup de massue. Deux semaines cloué au lit, à s'étonner chaque matin d'être encore en vie. De grand et bien en chair, Nans était passé à courbé et décharné. Une descente aux enfers, des questions par centaine. Un moment, il avait pensé en finir. Se laisser lentement mourir dans ce lit qui était le sien, dans cet appartement qu'il louait, sous ce toit – ce précieux toit – qui le protégeait des intempéries du monde extérieur. Mais son corps, encore alerte, avait fait son travail. Il s'était relevé : amaigri, affaibli, sombre… Mais toujours vivant.

Ce n'était qu'après qu'il s'était vu forcé d'aller voir un médecin : garder son travail était une nécessité. Il ne pouvait pas se permettre de retomber dans une anxiété quotidienne : celle de vivre sur ses maigres économies et de se savoir une fois de plus près d'une vie en suspend dans la rue, à crever de faim et mendier pour le moindre pokédollar.
Le verdict était tombé avec une violence inouïe. Les traitements aussi… Son corps les avait rejetés ; s'en était suivi de longues semaines de galère, à vomir ses tripes tous les jours, à maigrir toujours plus.
Aujourd'hui, malgré quelques petits désagréments, il s'était habitué. Mais les médicaments lui coupaient toujours l'appétit, et reprendre du poids, se remplumer un peu était devenu mission impossible. Une menace pour son emploi.
Les femmes ne voulaient pas d'une loque. Un escort se doit d'être beau. C'est un bijou, un élément de décoration qui brille au bras d'une dame.
Nans ne brillait plus. Sa bonne étoile – pourtant déjà bien sombre – s'était éteinte pour ne laisser que le désespoir et la désolation dans son sillage.

Alors, chaque matin, Nans se confrontait à ce miroir, ce terrible miroir qui lui faisait tant de mal, qui était devenu le décompte des jours qui lui restaient à travailler.
Grand, très grand, c'était d'abord ce qui avait attiré son patron il y avait déjà de cela quelques années. On lui avait présenté ce gourou ; on l'avait jeté dans la gueule du loup. Doucereux, celui-là. Respectueux tant qu'il travaillait, tant qu'il faisait les choses bien. Dangereux lorsqu'on venait à menacer la pérennité de son affaire.
Du haut de ses deux mètre cinq, le garçon des rues l'avait ébloui. Unique, c'était le mot qui lui était venu. Unique et donc à succès. Il ne pouvait pas laisser passer une telle occasion de se faire du fric.
Les femmes, notamment les plus extravagantes, allaient l'adorer.

L'entreprise était une vitrine. Les clientes choisissaient leur homme et repartaient avec pour une soirée. C'était comme ça qu'on fonctionnait, ici.
Au début, on avait beaucoup choisi Nans ; de quoi s'habituer au métier. Dès qu'il s'en était senti capable, il avait élargi le forfait ; il s'était aussi offert pour des nuits entières… Seulement aux femmes : ce n'était pas le cas de tout le monde, mais ça, Nans se le refusait.
Dans les bras de ces madones, de ces pauvres âmes délaissées, éplorées, il avait entendu beaucoup de choses… Des informations intéressantes qu'il lui était arrivé de monnayer… Puis, aussi, des portraits. Des portraits d'inconnus, des portraits de ses collègues, des portraits de lui-même.

Miroir, mon beau miroir… Qui est le plus beau ?
Ce n'est pas toi, Nans. Mais tu as été quelqu'un de charmant, il fut un temps.


On aurait pu qualifier sa beauté de sauvage. Brute, sans artifice.
Son visage effilé, long, sculpté dans un bronze brut et sans imperfection, était typique des faciès woestanais. On y reconnaissait une attitude féline. Un front fier, bombé, des pommettes tranchantes qui structuraient un minois étonnant, presque iconique. Le nez, aussi, était long, courbé. On aurait pu parler d'aquilin, mais austréen était plus exact. Il avait ce nez phare, typique, célèbre. Celui-la même qu'on retrouvait sur les statues anciennes. Couplé à un regard de feu, l'effet était extraordinaire.
Deux yeux, eux aussi familiers, qui semblaient naturellement fardés d'un noir profond, faisant ressortir l'or de ses iris. Ce n'était aucunement un maquillage, si ce n'était un maquillage directement encré dans la peau. En réalité, ses cils bruns, longs, fournis, atouts pour se protéger du sable du désert, mettaient en valeur ce reflet de l'âme, cet éclat discret et parfois même impressionnant que contenaient ses prunelles étroites, fines, mais éblouissantes. On avait là deux trésors infiniment attirants, irrésistibles. Comme deux pépites d'or brut qui vous observaient à l'ombre de cils légèrement recourbés, d'un noir parfait, intense.
Ce regard était expressif. On pouvait y percevoir l'ébat des pensées, le passage furtif d'une idée, les ténèbres d'une colère. Les larmes, quant à elles, donnaient un éclat, une vie toute nouvelle à ces yeux délicats, enfoncés dans les orbites d'un visage aux reliefs durs, tranchants, qui avait ce je-ne-sais quoi de terriblement masculin.

Avec le temps et la maladie, des cernes profonds s'étaient tracés dans la peau. Noirs, hématomes d'un manque de sommeil, d'une souffrance quotidienne. Les paupières, autrefois larges mais fines, avaient un peu gonflé et donnaient désormais un air fatigué à ce visage pourtant si jeune, si beau encore… Une beauté néanmoins fanée.
Il n'était pas rare de voir les joues d'un séropositif malade se creuser. Nans n'avait pas échappé à ce phénomène ; ce n'était pas juste l'amaigrissement : c'était la maladie qui laissait ses marques.
Les lèvres gercées, quant à elles, accompagnées de ce teint parfois un peu cireux, tenaient à cette cigarette qu'il avait souvent au bec et dont il extrayait un poison délicieux, anesthésiant de ses pires douleurs, de ses pires pensées.
La drogue avait dû avoir sa part dans ce travail d'orfèvre, elle aussi. Peut-être un peu plus de noir dans les cernes, un peu plus d'épaisseur dans les paupières, un peu plus de vie dans les joues…? Tout se mêlait, les responsabilités se perdaient… Après tout, ce n'était pas bien important.
Comme pour détourner l'attention de ce charnier, de ce lent affaissement d'une beauté perdue, le jeune homme avait trouvé bon de décorer ses oreilles de diverses breloques. C'était là les seules modifications corporelles auxquelles il avait eu recours, après l'aiguille du tatoueur. Son lobe, au fil des années, s'était lentement vu étiré pour laisser entre-paraître un trou béant que Nans comblait par des boucles vides, épaisses,effilées qui oubliaient le plus souvent de se fermer. Au-dessus, un anneau simple des deux côtés, et un trou au cartilage de l'oreille gauche.
Piercings ou marques sociales dans une société encore conservatrice. Nans ne s’en était jamais caché : il avait toujours aimé se démarquer du reste du monde… Acte paradoxal pour un homme destiné à raser les murs… Peut-être celui d’une rébellion silencieuse ; une façon de dire à l’univers : j’existe. Car il était arrivé des moments où il avait pu en douter…
Sa lourde chevelure rassemblée en de longues dreadlocks suivait le même principe : se différencier des autres ; s’approprier ce corps qu’il lui était arrivé de détester, duquel il s’était senti de nombreuses fois étranger. D’aussi loin qu’il se souvienne, Nans n’avait jamais porté de ciseaux à sa tignasse broussailleuse. Il l'avait toujours laissée pousser et s’était lancé dans la confection lente et progressive de ces nœuds organisés… Peut-être une métaphore de sa vie où la misère, elle aussi, était cadrée et sectionnée avec une précision chirurgicale.
Avec le temps et la patience, les dreads, comme les fils conducteurs de toute une vie, s’étaient allongées pour atteindre le milieu de son dos. Parfois, elles tombaient… C’était une douleur profonde pour l’homme qui voyait en ces artifices le temps écoulé et révolu. Chaque dreads coupée était la disparition d’une part de lui-même. Ça remuait quelque chose au fond de lui ; quelque chose d’étrange.

Son corps aussi, était marqué des stigmates d'une vie laborieuse. En grandissant – et surtout en ne s'arrêtant pas de grandir – la peau couleur bronze de Nans s'était parée de cicatrices. Cette enveloppe charnelle s'était lentement craquelée sous la croissance rapide, démesurée, et avait laissé des veines blanches, indélébiles, le long de ses cuisses, en bas de son dos, en-dessous de ses épaules…
Le contraste était saisissant ; la peau sombre, tannée par le soleil, striée de racines blanches était une vision surprenante… Mais alors qu'on aurait pu penser à une caractéristique particulièrement inesthétique, ces cicatrices particulièrement marquées lui conféraient au contraire une particularité intéressante, attirante, qui parfaisaient un physique déjà charismatique.

Nans n'était pas beau. Il était imparfait. Et ces imperfections lui donnaient une splendeur peu commune, un petit quelque chose d'irrésistible, de charmant.
Seulement, la maladie avait terni cette magnificence. La fougue de ce physique peu commun s'était vue tassée avec la maigreur qui avait creusé ses côtes… Désormais, seule la part d'ombre restait visible : stigmates d'une vie d'excès et d'addiction, marques d'un mal incurable, des remèdes agressifs… Et la fatigue d'une existence sans trêve, sans réel moment de bonheur.

Dans une impasse, une période sombre, il s'était fait à tout jamais graver sur la peau les figures devenues arabesques de Reshiram et Zekrom. Réalité, Idéal… La réalité avait toujours étouffé ses rêves ; ses idéaux n'avaient jamais quitté son esprit.
Ce tatouage s'étendait sur ses omoplates, le plus souvent masqué par ses cheveux. C'était là un concentré de sa vie et de sa vision de l'existence : du noir, du blanc, parfois du gris. Jusqu'à ce jour, la couleur ne s'était jamais invitée dans son quotidien.
HISTOIRE -
I - Toute bonne chose a une fin

La mort, même maquillée, n’est pas belle à voir. C’était ce qu’avait pensé Nans Kahil après avoir habillé cet homme qui avait un jour été son bienfaiteur et dont il ne restait plus qu’une dépouille immobile, figée en un rictus désormais éternel.
Il avait trouvé cet ensemble dans l’armoire du vieux paysan. Sans doute ce costume avait-il déjà servi quelques fois pour des évènements importants… Un mariage, une fête, l’enterrement d’un autre…?
La roue tourne. La vie est un cycle éternel qui ne cesse de répéter les même chapitres. Elle n’innove pas beaucoup, change seulement quelques détails qui se fondent les uns dans les autres avec le temps… À la fin, il ne reste toujours que cet état rigide, irréversible. Celui qui ramène tous les Hommes, qu’importe leurs origines, leurs croyances, leur statut social, au même niveau.

Porter le corps jusqu’à la chambre à coucher n’avait pas été facile. Le jeune homme était grand, mais pas invincible. Monsieur Nasab était de ces aînés d’apparence fragile mais encore solides. Il faisait son poids… Pourtant, pour l’avoir déjà porté sur de courtes distances, notamment dans des moments difficiles où la maladie ne lui permettait plus de se lever, Nans avait pensé en le soupesant une toute dernière fois qu’il était plus léger que d’accoutumée. Cette impression, aussi étrange fut-elle, portait à la rêverie : nombreux avaient été les scientifiques et philosophes qui avaient un jour supposé que l’âme, comme tout organe du corps humain, avait une masse. Et que cette masse, à la mort, comme l’âme s’éteignait, disparaissait dans son sillage.

Habitué à voir ce visage se mouvoir, s’exprimer sous ses yeux, Nans continuait d'imaginer la commissure crispée des lèvres du vieil homme se soulever, ses sourcils frémir, ses paupières closes se rider. Ce n’était qu’une illusion, résultat de cette confrontation étrange avec la mort. Il était très étonnant d’avoir ce corps parfaitement immobile sous ses yeux. Jusqu’alors, il n’avait encore jamais vu de dépouille ; c’était sa toute première fois et tout en lui lui murmurait de fuir. Le laisser là, seul, et s’en aller loin, très loin pour se mettre hors de portée de cette terrible fatalité. Pourtant, une force silencieuse le poussait à rester. À veiller sur ce corps aussi longtemps qu’on le lui autoriserait.
C’était peut-être là de la reconnaissance : Khalid lui avait beaucoup donné. Nans, quant à lui, avait toujours essayé de lui rendre sa générosité, de faire preuve d’humilité et de gratitude. S’il y était parvenu ? Sans doute. Il y avait de cela quelques jours, le vieil homme l’avait appelé “fiston”. Une marque d’affection à laquelle le woestanais n’était pas habitué mais qu’il avait su apprécier à sa juste valeur.
À vrai dire, au cours de ces durs mois de labeur, il avait noué un lien fort avec l’éleveur. Ils n’étaient plus seulement deux étrangers qui travaillaient ensemble pour le bien de l’exploitation et la santé du patron mais un père et un fils adoptifs qui se prêtaient main forte dans leur vie commune et quotidienne. Une situation qui, si elle avait un peu perturbé le jeune homme au début, était venue à lui plaire au point même de lui laisser espérer un avenir doux et agréable.
Ça non plus, il n’y avait jamais eu droit. Un quotidien tranquille, rythmé par le travail, le respect et l’amitié. C’était bien là son idéal de vie ; celui qu’il n'atteindrait sans doute jamais, ou peut-être dans un futur lointain.

Une fois de plus, il avait touché son rêve du bout des doigts, l’avait effleuré, presque éraflé… Mais tout s’était évanoui. Retour au point de départ…
Les larmes qui coulèrent sur les pommettes saillantes du jeune homme étaient empruntes d’une amertume profonde. Ce n’était pas la vue du corps inanimé de cet homme qu’il avait aimé qui le bouleversait, non. C’était autre chose. Notamment ce terrible sentiment d’injustice qui venait une fois de plus le prendre à la gorge et doucement l’étouffer, assez pour qu’il puisse agoniser un temps avant de le laisse respirer à nouveau normalement.
Il s’était vu faire sa vie à Rykaarde, dans ce foyer qui l’avait accueilli et accepté pour la personne qu’il était, ne tenant compte à aucun moment de ses origines. Jamais encore on ne lui avait ouvert les bras de cette façon. Il devait tout à cet homme qui lui avait offert un asile sans tenir compte de son passé trouble. Il n’y avait eu qu’une recommandation : “Si tu fais bien ton travail et que tu ne crées pas de problème, tu seras payé, nourri et blanchi.”. Un marché équitable que Nans s’était à l’époque empressé d’accepter. C’était sans savoir qu’il deviendrait le rayon de soleil de ce vieux paysan en manque de compagnie.

Khalid, autour d’une bouteille de rhum, lui avait un jour raconté être en froid avec son fils unique. Une vieille histoire qui n’avait jamais trouvé de fin et perdurait encore aujourd’hui. Il avait souvent répété que cet enfant qui ne prenait même pas la peine de s’inquiéter de sa santé ne reviendrait que lorsqu’il serait six pieds sous terre pour prendre tout son argent : “C’est toi qui devrait le toucher, cet héritage. Je te ferai un papier. Il est hors de question que tout lui revienne…”. Nans, enfermé dans un respect tacite, avait simplement acquiescé, sans porter aucun jugement. Bien sûr, il avait souhaité que cela se réalise. Avec cet argent, il ne vivrait plus dans la rue. Avec cet argent, il pourrait garder l'exploitation du vieil homme et manger à sa fin pour les décennies à venir.

Peut-être même qu'avec cet argent, il aurait eu le courage de se déclarer à la fille du voisin. Une beauté extraordinaire, un esprit fin et original… Il en était tombé amoureux, mais rien ne semblait détourner cette douce créature de l’amitié qu’elle s’imaginait entre eux.
Nans n’avait encore jamais eu l’audace de lui parler de ses sentiments, plus grands à mesure que les jours passaient… Une pudeur qui lui était toute naturelle et qui l’empêchait de prendre les devants et de s’affirmer en tant qu’homme et non simple garçon de rue, récupéré dans un caniveau par un vieil éleveur généreux. Car c’était l’image qu’il avait de lui : celui d’un Crapustule perdu dans un nid de Lackmécygne. Il n’avait aucune chance, c’était une certitude. Le père de Maryam refuserait à coup sûr et il serait humilié ; c’était sa peur première, celle qui le murait dans un silence douloureux et plein à craquer de confidences qui ne verraient sans doute jamais le jour.

L’argent l’aurait aidé dans cette affaire. Mais ce papier dont Khalid avait pu lui parler n’avait jamais vu le jour. Sans doute ne pensait-il pas partir aussi vite. À vrai dire, personne ne s’y était préparé. Certes, il souffrait parfois de son âge avancé ; il lui arrivait d’être essoufflé, de devoir faire une pause dans ses tâches domestiques, mais c’était des situations extraordinaires, rares et surprenantes. Monsieur Nasab avait toujours été une force de la nature ; tout le monde aurait parié le voir vivre au moins dix ans de plus… Mais la vieillesse avait eu raison de lui. Mort dans son champ, foudroyé par une crise cardiaque fulgurante et quasiment indolore.
Nans l’avait vu tomber devant ses yeux, raide, inerte. Il avait tout de suite compris et n’avait pas attendu pour le porter à sa chambre. Ce n’était que par la suite qu’il s’était mis, dans le silence assourdissant de la maison désormais vide, en quête de vêtements propres et présentables.
L’habiller avait été une épreuve difficile, celle qui avait remué des sentiments douloureux dans sa poitrine et l’avait poussé à laisser couler ses premières larmes. Nans n’était pas quelqu’un d'expressif. Ses années d’errance l’avait aseptisé quant au monde et aux évènements extérieurs… Tout ce qui le touchait ne semblait avoir qu’un effet mineur sur son état mental… Ce n’était bien évidemment qu’une illusion, celle d’un masque de pierre qui s’était construit au fil des épreuves de la vie et qui n’était pas prêt de tomber.

Ainsi se retrouvait-il assis aux côtés de ce corps, assailli par un sentiment de solitude imparfaite. Car, s’il n’y avait plus qu’une seule âme dans cette chambre à coucher, quelqu’un d’autre était bel et bien avec lui, tout près… Cette présence étrange, morbide, lui aurait sans doute donné froid dans le dos s’il n’était pas déjà préoccupé par son futur proche qui se voilait lui aussi de ténèbres.
Empruntant une gestuelle lente, comme si quelque le poussait à faire tout son possible pour ne pas éveiller le mort, il prit son paquet de cigarettes, posé sur la table de chevet, et alluma l’une d’entre elles dans un silence presque religieux avant de la porter à ses lèvres et d’en tirer une bouffée chagrine. Les yeux rougis par le chagrin mais aussi par la colère, il observa ce visage déjà émacié ; tout juste mort, l’homme qu’il avait connu commençait déjà à ressembler à un autre. Il ne parvenait plus à le reconnaître ; quelque chose avait changé.
Il jeta un coup d'œil furtif à la pendule du réveil et tourna la tête pour recracher un long nuage de fumée blanche qui s'éleva et se heurta au plafond, se dispersant dans toute la pièce.
Une fois le défunt habillé – il avait aussi pris le temps de le raser – il avait appelé les voisins avec le téléphone fixe de la maison. C'était Maryam qui avait répondu ; une voix d'ange au beau milieu de cet enfer. Sans doute son ton grave, dénué sentiment, l'avait-il un peu surprise… Mais elle n'avait fait aucun commentaire et avait seulement promis d'arriver au plus vite. Il fallait avouer que la jeune femme était désormais habituée au caractère taciturne de l'employé de Monsieur Nasab. Il n'y avait plus de quoi s'étonner ou s'épouvanter ; une fois qu'on connaissait Nans et qu'on l'avait apprivoisé, il n'était plus qu'un garçon un peu froid et très réservé. Ni plus, ni moins.

Sans doute devrait-elle arriver d'une minute à l'autre, désormais. Nans appréhendait ces retrouvailles… Il redoutait de se montrer dans un tel état de faiblesse. Mais, d'un autre côté, il voyait là l'occasion de se présenter comme un garçon un peu plus humain, doté d'une empathie commune et de sentiments comme n'importe quel autre homme que Maryam aurait pu rencontrer.
Un soupir angoissé s'échappa tout de même de ses lèvres crispées lorsque ses coups sur le battant de la porte retentirent dans toute la maison. Il mit un temps à réagir, à se tirer de ce fauteuil qu'il avait tiré auprès du lit. Il chercha un instant du réconfort sur le visage du défunt mais n'eut droit qu'à une vision horrifique qui fit dégringoler un frisson le long de son échine. Alors, poussé par l'épouvante, piqué par le désir brûlant de se sortir de cette ambiance morbide, il sauta sur ses pieds et s'empressa de quitter la pièce pour rejoindre l'entrée.

Le visage larmoyant de la jeune femme le laissa un instant interdit, mais il se reprit bien vite en ouvrant la porte en grand et en se décalant pour la laisser entrer. Maryam, qui avait visiblement revêtu à la va-vite une robe en toile grossière, fit un pas en avant, hésitant, puis deux, et demeura ainsi immobile sur le pas de la porte, observant la maison qu'elle connaissait pourtant comme sa poche avec un drôle d'air.
Ne sachant quoi dire, Nans se tint derrière elle et attendit qu'elle veuille bien prendre la parole dans un silence pesant. Il n'y avait pas de bonne façon d'engager la conversation ; dans ces moments-là, tout sonnait faux, indifféremment des efforts employés :

▬ Où est-il…?
▬ … Dans la chambre. Suis-moi.

Marche silencieuse jusqu'à l'objet de leurs tourments. Nans laissa passer la jeune femme devant une fois arrivé au niveau de la chambre et se tint dans l'embrasure de la porte. Il l'observa alors s'avancer tout doucement, sur la pointe des pieds, et s'asseoir au bord du lit bien après avoir avisé le fauteuil. C'était là la marque d'un courage hors du commun ; manifestation que releva le jeune homme pour lui-même, surpris d'une telle audace. Personne n'avait particulièrement envie de partager un lit avec un mort. Des chaises, amassées autour, permettant de garder une certaine distance, étaient souvent préférables. Ce signe de bravoure, cette provocation faite en face même de la mort fit éclater une bulle d'amour dans son ventre qui se traduisit par une soudaine nausée… Il fit entendre un petit soupir tremblant que Maryam ne sembla pas remarquer, trop occupée à dévisager le mort, absorbée par ce tête-à-tête qui tenait du surnaturel.

Lui n'osa pas la rejoindre, demeurant immobile, figé tel une statue de cire contre le cadran de la porte. Il trouva bon de détailler chaque recoin de cette petite pièce qu'il connaissait peu, chaque objet qui se présentait à lui tout en prenant soin de ne pas laisser peser son regard trop longtemps sur la dépouille qui semblait s'enfoncer inexorablement dans le vieux matelas.
Ce fut à nouveau l'éleveuse qui leva ses yeux humides, d'un brun envoûtant, à lui pour lui demander d'une voix chevrotante :

▬ C-C'est arrivé quand…?

Le jeune homme esquissa un léger haussement d'épaule et ne répondit qu'après avoir marqué un temps d'hésitation où l'émotion s'était immiscée et avait semé le doute dans son sillage.

▬ J-Je sais pas… Y'a une heure… Une heure et demie, peut-être…? Écoute, j'en sais rien… Je m'en suis occupé, je n'ai pas fait attention à l'heure.

Elle opina doucement du chef sans pour autant lui répondre et leva une main tremblante qu'elle posa sur celle rigide du vieil homme. Elle eut un léger mouvement de recul qui donna des frissons à Nans mais finit par resserrer ses doigts fins, roses, regorgeant de vie, sur ceux gris, inertes de Monsieur Nasab.
Alors seulement, elle laissa entendre un long soupir et secoua doucement la tête, comme rattrapée par l'accablement qui pesait déjà sur les épaules de l'apprenti éleveur :

▬ I-Il est tellement froid…
▬ Allez… Arrête. Tu te fais du mal. On se fait du mal… À pas de loup, Nans s'approcha à son tour de la jeune femme et prit délicatement son autre main dans la sienne pour ne pas la brusquer. Viens. Je vais te donner quelque chose à boire, d'accord ? Allons dans la cuisine.

À cette heure-ci, Nans était habitué à préparer un café pour son employeur qui rentrait toujours exténué du champ. S'occuper du bétail, parcourir les différentes granges était épuisant. Ici, on se levait tôt, on se couchait tard… C'était un ballet permanent qui lui avait pourtant appris la rigueur et le plaisir que procurait un effort physique quotidien. Cette petite vie rangée, Monsieur Nasab n'avait pu se l'offrir qu'en embauchant Nans, et c'était tout à fait réciproque. Tout deux s'y étaient habitués, et d'un commun accord, à chaque pause, le jeune s'occupait du vieux. Comme un échange entre deux générations que tout opposait mais qui se comprenaient pourtant à merveille, sans même avoir besoin de parler.
Nans avait fini par prendre soin du vieil homme comme s'il avait été son père, à une différence près : il n'aurait jamais fait autant d'effort pour son géniteur.

Aussi, s'installer dans cette cuisine, à cette petite table ronde sans Khalid lui faisait tout drôle. À sa place habituelle se trouvait désormais l'objet de tous ses désirs inavoués, cette femme magnifique qu'il ne pourrait plus jamais espérer obtenir et qu'il devrait se contenter d'observer… Maryam était une de ces beautés typiquement austréenne. Un front fier, bombé, embelli de deux sourcils bruns, sérieux et fournis. Ces derniers surmontaient des yeux aux cils longs et épais, au regard franc et aux iris chatoyantes. Le reste était fin : un visage ovale, un menton finement ciselé dans une peau brune, tannée par le soleil, des lèvres pulpeuses et enfin un nez long, droit, légèrement recourbé sur la fin. L'ensemble était très harmonieux et laissait apparaître un doux minois de caractère qui ne pouvait aucunement laisser indifférent. Son corps était celui d'une reine ; ses formes, généreuses, étaient admirablement réparties, sa figure élancée sublimait sa taille fine et son joli mètre soixante-dix. Une belle plante, incontestablement… Mais terriblement épineuse et protégée sous une cloche de verre qui la rendait tout à fait inaccessible.

▬ Nans, s'il-te-plaît. Tu peux me faire un thé à la mente…? Avec beaucoup de sucre.

Le jeune homme, détachant son regard admiratif du visage de la demoiselle, acquiesça silencieusement et s'empara du pot de mente séchée qui reposait contre le mur, aux côtés d'autres arômes et épices aux senteurs purement exquises.
Il mit de l'eau à chauffer dans une bouilloire et laissa planer un silence tranquille, qui contrastait nettement avec la tension qui avait un peu plus tôt régné dans la chambre à coucher. Habituée à lancer les conversations en présence de ce garçon discret et mutique, Myriam reprit la parole en observant d'un œil critique ses gestes appliqués :

▬ Et toi dans tout ça…? Tu te sens comment…? Tu ne parles jamais de toi, mais tu te soucies toujours des autres…

C'était une vérité en demi-teinte. Nans n'aimait pas partager ses sentiments ou ses impressions. Sa pudeur naturelle l'en empêchait… A contrario, il écoutait souvent les maux et les émotions de ceux qu'il aimait ou appréciait. Quant au commun des mortels, il n'y portait aucune attention. C'était bien là que résidait son indifférence et son côté terriblement antipathique qui rebutait tant de personnes au premier abord. Les gens aiment qu'on s'intéresse à eux. Le contraire les énerve grandement.

▬ Je ne sais pas. Tu te doutes bien que je ne vais pas te dire que c'est la grande joie. Je l'aimais bien, ce vieux.
▬ Il t'aimait aussi. Mon père disait qu'il te considérait presque comme son propre fils… 
▬ … Avec lui, j'ai eu un père pendant deux ans. C'était une bonne expérience.
Maryam demeura muette quelques secondes au cours desquelles le sifflement de l'eau dans la bouilloire se fit entendre. Puis, un peu hésitante, elle osa poser la question délicate qui lui trottait dans la tête depuis le début de la conversation.
▬ Il aurait aimé te voir reprendre l'exploitation. Est-ce que tu vas le faire ?  Nans lui lança un petit regard en coin, noir, un peu vide, et secoua doucement la tête tout en versant l'eau chaude dans une tasse où il avait déjà entreposé quelques feuilles de mente.
▬ En quel honneur ? Le vieux disait beaucoup de choses, mais il ne se pressait pas. Tu le connaissais bien. Tu sais qu'il pensait vivre vingt ans de plus sans problème. La vie les a enterrés avant l'heure, lui et ses souhaits.
▬ Rien…? Il n'a rien laissé ?
▬ Rien. Ce fils qu'il portait tant dans son cœur va pouvoir tout rafler après avoir vu son cadavre. Il ne reconnaîtra pas son père, cela fait dix ans qu'ils ne se sont pas vus…  Nans fit entendre un long soupir et déposa la tasse de thé et quelques carrés de sucre devant son interlocutrice. Mais qui suis-je pour juger les relations d'un père et d'un fils…? Je ne considère même plus mon géniteur comme tel. C'était leurs affaires, pas les miennes…
▬ Mais enfin…! Toi, tu vas aller où…?

Le jeune homme esquissa un petit haussement d'épaule évasif en s'asseyant en face de la demoiselle. Où irait-il ? C'était une excellente question. Le futur s'assombrissait, après deux ans de grand soleil et de tranquillité. Nans ne voulait pas écouter cette peur panique qui recommençait à le prendre à la gorge… Mais la crainte de retomber dans la misère d'avant le terrifiait. Bien sûr, il était trop fier pour l'admettre ou même oser en parler. Adopter une attitude indifférente lui convenait mieux, surtout en face de cette femme qu'il aurait aimé impressionner.

▬ Lorsque je verrai son fils… J'essaierai de tirer mon épingle du jeu. Mais je ne nourris pas beaucoup d'espoir là-dessus. Je vais faire mes valises, repartir pour Solem ou Woestan… Me trouver un autre travail, vivre sur mes économies un temps… Je ne sais pas encore. C'était assez inattendu.
▬ Nous, on peut t'aider, tu sais ? Peut-être que si j'en parle à mon père…
▬ Non. Ne te fatigue pas. S'il y a bien une chose que je déteste, c'est dépendre de quelqu'un d'autre que moi-même.

Myriam ouvrit la bouche… Mais la referma aussitôt. Nans avait employé ce ton ferme, tranchant, qui signait la fin de leur conversation. Elle n'en tirerait rien de plus ; insister ne ferait que l'énerver. Elle commençait à connaître son caractère difficile, ses moments de silence et ses périodes des paroles froides et sarcastiques. Il tournait en permanence sur ces deux formules, et ça avait quelque chose de fascinant.
Elle retint un petit soupir et but son thé dans le calme de la cuisine, rythmé par le "tic tac" incessant de la vieille pendule… Nans, quant à lui, avait plongé son regard dans le vague, pris dans les méandres de son esprit laborieux… Myriam le dévisagea à la dérobée, par-dessus sa tasse de thé : avec du recul, elle s'était attachée à ce garçon. Elle aurait aimé qu'il reste encore un temps. Passer du temps avec lui, apprendre à mieux le connaître, réussir à ouvrir son cœur. Mais c'était trop tard, désormais. Elle devait se rendre à l'évidence : il n'y avait pas d'espoir pour le voir habiter définitivement cette maison. Il serait sans doute renvoyé.
Son autre gorgée d'infusion brûlante eut un goût amer. Elle laissa finalement échapper une simple formule de politesse, pour conclure ce débat qui n'aurait pas lieu, laissant entendre une certaine lassitude :

▬ Il est bon, ton thé.

II - Homo homini lupus est.

L'Homme a toujours cherché à dominer l'Homme. C'est un combat de coq permanent. Physiquement, psychologiquement, la nature creuse de nombreuses inégalités au sein même de l'espèce humaine. Des inégalités à l'origine de différences. Des différences qui classent, qui isolent, qui discriminent.
Certains sont intelligents, d'autres sont idiots. La faute à pas de chance. La faute aussi à une mauvaise génétique… Ou serait-ce plutôt au climat social dans lequel a grandi l'enfant ? Peut-être. On peut aussi imaginer que les trois facteurs se soient mêlés dans certains cas pour mener à ce défaut honteux, risible ; celui d'être bête.
Certains sont grands, d'autres sont petits. C'est la vie : les ancêtres ont gâté leurs descendants d'une taille avantageuse ou désavantageuse contre leur plein grès. Soit, tout le monde le sait. Pourtant, il n'est pas rare d'entendre les enfants ou même les adultes se moquer de leur camarade trop petit ou au contraire de cette fille pataude et un peu trop grande pour son genre.
De classe en classe, d'étiquettes en étiquettes, la société se scinde en milliers de petits groupes distincts. Certains d'entre eux remontent dans le haut du panier et font lentement couler les autres. Il suffit de les étouffer sous des moqueries ou des critiques ; rien de plus simple.
Dominer, montrer qu'on est le meilleur : voilà une activité intéressante. Dominer, dire à l'autre qu'il ne vaut rien, qu'il ne nous surpassera jamais : quel plaisir d'humilier l'adversaire, de le mettre à terre et de le nuire jusqu'à faire germer un traumatisme dans cette mémoire plastique.

D'aussi loin qu'il se souvienne, Nans avait toujours connu ce rapport de domination. Ce désir de l'enfoncer, de le descendre plus bas que terre.
Sa mère, une prostituée des faubourgs de Solem, avait un temps vécu avec son père avant de mourir d'une maladie inconnue quand il avait quatre ou cinq ans. Le jeune homme ne s'en souvenait pas. Il ne pouvait imaginer que ce qu'on avait voulu lui raconter à son sujet, c'est à dire pas grand chose. Dans le voisinage, beaucoup disait que Monsieur Kahil était particulièrement cruel, avec elle. Il avait reconnu l'enfant lorsqu'elle était venue à lui avec le poupon dans les bras, mais il avait aussi exigé le mariage pour garder une main-basse sur cette femme qui venait de ruiner sa vie d'homme libre. Le mariage était, encore à cette époque – trente ans plus tôt –, synonyme de prison. Djamila avait été mise aux fers par cet homme qu'elle connaissait à peine et qui lui avait mis un enfant dans le ventre au terme d'un caprice d'un soir d'ébriété.
Rabah avait toujours eu une addiction à la boisson. Même gamin, Nans se souvenait de cette odeur rance qui régnait dans leur humble masure les soirs où son père rentrait tard de ce qu'il appelait "le travail". Dans des élans de colère noir, il criait souvent à son fils qu'il était né de l'alcool et que l'alcool était une pute. Des mots qu'un petit garçon de sept ans avait encore du mal à comprendre mais dans lesquels il discernait une haine et un mépris peu commun.
Car Rabah avait toujours détesté avoir un enfant : quelle plaie. Il fallait s'en occuper, le nourrir, l'élever… 
Tout le monde n'est pas capable d'être parent ; lui était purement incompatible avec la fonction. Il y avait certains jours où le garçon, affamé, en venait même à grignoter le pain raci, dur comme de la corne, tant son estomac criait famine. Il n'y avait pas toujours à manger, dans cette maison. L'école, bien souvent, lui sauvait la mise.
Pourtant, cette école, il la détestait. D'un milieu social plus que pauvre, miséreux, les autres enfants avaient tendance à le mettre de côté. Il n'était pas rare d'entendre professeurs et élèves se plaindre de ce petit spectre aux vêtements sales et à l'odeur forte. Au mieux, on l'ignorait. Au pire, on se moquait.
Nans avait toujours été un garçon emprunt d'une timidité et d'une pudeur presque maladive. Il ne parlait pas beaucoup, pensait en-dedans. Il n'ouvrait la bouche que pour exprimer une peine profonde, une peur terrible ; la joie, généralement, se traduisait par des larmes translucides qui coulait sur ses joues sales et se figeaient en de longs sillons brillant sur sa peau brune. Tout petit déjà, il se détachait de la masse. Il n'était pas cet enfant joyeux, plein de vie. Il était cet enfant anormalement calme, anormalement triste qui portait à question.
Mais, trop occupés pour s'inquiéter du comportement de ce petit garçon, les professeurs préféraient l'humilier devant ses camarades et le montrer du doigt comme fainéant qui ne cherchait qu'à attirer l'attention des adultes. Quand bien même ce fut le cas, Nans lançait des SOS. Malheureusement, chacun d'entre eux retombait dans le silence, dans le néant, et n'aboutissait qu'au pire.
Confortés dans leur méchanceté par les adultes, les autres enfants prenaient un malin plaisir à tourmenter ce garçon plus fragile que les autres. C'était une danse de Lougaroc autour du pauvre Moumouton galeux. Une façon de s'élever, de se sentir plus fort, invincible. Écraser l'autre a ce petit quelque chose d'extrêmement stimulant ; cet avantage qui amène le bourreau à se penser plus intelligent, plus solide et brillant que sa victime.
Domination.
Nans, déjà grand, plus grand que ses camarades, donnait tort aux apparences. Il avait tout d'une victime. Tout de cet omega, de ce souffre-douleur dans la meute de loups, persécuté par ses semblables, pris pour bouc émissaire en période de tension, et toujours laissé pour compte.

Une souffrance terrible pour un enfant enfermé dans un monde auquel il ne comprenait pas grand chose. Pour un enfant retournant le soir dans la sphère familiale qui n'avait rien de chaleureux, tout de terrible. Un père alcoolique, les insultes et les coups qui pleuvaient à la moindre incartade.
Il y avait des jours où de gros hématomes venaient noircir la peau déjà brune du garçon qui tentait alors de cacher les dégâts avec une couche de vêtements supplémentaire, torture dans une région chaude comme Woestan. C'était de la honte, c'était de la pudeur. Nulle envie que quelqu'un vienne fouiller dans ses affaires privées. Nans avait fini par rejeter cette main tendue, cette empathie qui avait trop tardé à venir. Avec le temps, avec l'âge qui avançait, il s'endurcissait. Son cuir devenait imperméable aux coups, aux injures. L'esprit était plus fort ; l'esprit restait intact alors que tout le négatif était refoulé. Le réservoir s'emplissait, s'emplissait… Et si un jour Nans était sûr de le voir éclater, il préférait ne pas y penser.

De cette enfance complexe, Nans n'avait gardé qu'une méfiance profonde de l'être humain, qui s'était couplé plus tard avec une déception immense. Il avait gardé cette peau dure, solide, qui faisait fis des petits blessures et lui permettait d'avancer qu'importe les circonstances. Enfin, il était resté cet enfant sans enfance, cet enfant auquel toute innocence avait été volée, cet enfant un peu triste, mutique et renfermé. Cette victime, dominée par les dominants, luttant bec et ongles pour retrouver son honneur après chaque descente aux enfers.

Lorsque le fils de Monsieur Nasab était venu, mettant pour la première fois en sept ans les pieds sur les terres de son père décédé, Nans avait reconnu en lui un homme de la pire espèce. Il était de ceux qui, non contents de leur réussite éclatante, affichait leur richesse jusque dans leur tenue, leur comportement et leur sourire. Des dents trop blanches pour être naturelles, un costume trop noir pour visiter un mort oublié de son vivant. Une mine trop fière pour espérer quoique ce soit quant à l'exploitation familiale.
Avant même de le saluer, Nans savait déjà qu'il avait bien fait de préparer ses valises : deux jours plus tard, il serait dans un taxi volant ou un train direct pour Woestan.
Le regard de dégoût que cet homme d'affaire avait posé sur ses cheveux avait fait bouillir en lui une colère noire, terrible, qu'il s'était pourtant efforcé de contenir pour ne pas aggraver son cas.
Entre ce Rykaardien qui avait réussi et ce Woestanais qui survivait, il y avait un fossé, une brèche qui ne pourrait jamais être comblée. Il y avait aussi une jalousie pure, destructrice. Le fils avait de la haine pour ce garçon qui avait pris sa place. Certes, il n'aimait pas son père, mais il aurait préféré que ce soit autrement, même s'il refusait de l'admettre. Le garçon des rues, qui nourrissait beaucoup de considération et de reconnaissance pour le père, avait longtemps imaginé le fils et se trouvait face à une image qui ne lui plaisait guère tant elle était semblable à celle qu'il s'en était faite :

▬ Alors c'était vrai ? On m'avait dit que mon père hébergeait un homme qui l'aidait dans son travail. Je ne pensais pas que c'était quelqu'un comme vous. Vous viviez ici tous frais payés ?

Nans aurait pu porter un costume fait dans la plus belle des étoffes que ses origines l'auraient tout de même trahi. Après deux ans d'une vie tranquille, loin de la misère, loin des quartiers mal-famés, loin des drogues qu'il avait pu vendre et consommer, il gardait toujours cette odeur de pauvreté, d'excès et de débauche. Une marque qui avait imprégné son accent, sa diction, son allure, sa démarche, ses réponses… Tout en lui indiquait une situation initiale qu'il ne cherchait même plus à dissimuler et qu'il assumait pleinement.
Néanmoins, devant tant de mépris, le jeune homme n'avait même pas cherché à répondre. Demeurant neutre, insensible à ces insultes à peine dissimulées sous couvert d'une fausse complaisance, la seule qui l'avait importé avait été de parler des funérailles de cet homme qu'il considérait et auquel il désirait dire adieu.
Si le fils Nasab avait émis une petite réserve quant à sa présence, en quelques mots secs et bien placés, Nans avait réussi à lui faire comprendre que ce n'était pas de son ressort. Les enterrements n'avaient rien de privé : s'il désirait y participer, il y participerait. Il n'osa pas ajouter que les invités seraient sans doute plus surpris par son absence que par celle de ce fils disparu depuis des années.

Maryam et son père acceptèrent de l'héberger le temps que le vieil homme soit inhumé. Le soir même de la cérémonie, Nans repartit pour Woestan, désirant couper définitivement ce lien fort qu'il avait noué avec les terres de Rykaarde et ses habitants. Il aurait pu y demeurer, monter sa propre affaire… Mais les chances d'échouer aurait été grandes : on ne fait pas de trois Moumoutons son gagne-pain.
Alors, il n'avait eu d'autre solution que de partir, et pas même les pleurs discrets de Maryam n'avaient su le retenir. En trois jours, il avait su faire le deuil de cette vie paisible dans les champs de Rykaarde. En trois jours, il s'était résolu à retourner dans la gueule du loup, dans les faubourgs malfamés de cette ville fortifiée, aux tréfonds de l'Austrée.

Ce n'était qu'un au revoir, évidemment. Un au revoir au goût de renouveau et d'abandon.
Deux ans plus tôt, Nans s'était réinventé. Renouer avec ses racines, renouer avec son passé tortueux avait quelque chose d'effrayant… Mais il était prêt.


Et sinon ?
QUI ES-TU DERRIÈRE TON ÉCRAN ?-

Un joli sobriquet ? Lelex la terreur  moustachu

Combien de printemps ? Eh bien toujours 19. Il y a des choses qui ne changent pas ~  grin
Comment as-tu trouvé notre cher forum ? Essaye de t'en souvenir, c'est pas bien dur !

T'en penses quoi ?  panpanculcul

Ton poké préféré ? Would I do it again ? ▬ Nans  Miniat10  golden heart  beusou

Dis-moi, n'as-tu pas trouvé quelque chose de bizarre dans le règlement ? Ce code m'apporte un plaisir sadique. Moi j'ai pas à le chercher… Mais j'assiste à votre souffrance ~ C'est mon petit plaisir coupable, je l'avoue  heart1  cliclin  hee  toimêmetusais

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Andrea Saadauri
Andrea Saadauri
Pas de compétences
Would I do it again ? ▬ Nans  Miniature_677_XYWould I do it again ? ▬ Nans  Miniature_774_Orange_SL
Pokédollars : 61
Would I do it again ? ▬ Nans  Miniature_Badge_Roche_RFVF
Inventaire : - 1 Pokéball
- 2 Potions
- 1 Total Soin
Would I do it again ? ▬ Nans  Miniature_Badge_Roche_RFVF
Andrea Saadauri
Étudiant en Astrophysique
Mer 24 Juin - 20:51   

III - lorem ipsum

▬ Walid… Il faut vraiment que tu te sortes de toute cette merde. Ça ne peut plus durer, et tu le sais.

Assis droit sur le vieux canapé, l’escort gardait la tête en arrière, une main plaquée sur son nez. Ses doigts, déjà trop rouges, étaient désormais gâtés de craquelure dans le sang séché qui s’y était accumulé. Pour autant, le fluide ne cessait de filer entre ses jointures. À ses côtés, Nans le couvait d’un regard inquiet. Il n’était plus habitué à cette violence ; autrefois, c’était lui qui s’était retrouvé dans l’état de ce garçon. Il l’abritait désormais chez lui, dans cet appartement au loyer léger.
Dans la hâte, en apercevant le carnage, il avait couru chercher une bassine d’eau tiède et quelques serviettes. L’arcade était aussi touchée, l’œil avait un peu gonflé. La belle gueule de Walid était déformée par les coups et les commotions. Ci et là, des hématomes commençaient à se dessiner sur sa peau brune, tannée par le soleil.
Si Nans n’avait jamais été très doué pour la conversation, il était habile de ses doigts. C’était un compliment que lui faisait souvent Monsieur Nasab, parti quelques années plus tôt. Le vieil homme n’était plus qu’un lointain souvenir. Comme une saveur un jour appréciée qu’il n’avait pu goûter à nouveau. Il y avait là un puits sans fond de nostalgie, une petit peine qui ne guérirait sans doute jamais.
Alors, usant de ce don – sans doute un des seuls que lui avait conféré mère nature –, il laissait aller et venir ses doigts entre la bassine et le visage de son collègue ; l’eau, au fil de la désinfection, était devenue rouge… Pour autant, vacciné depuis longtemps, Nans n’éprouvait aucun dégoût à y tremper ses mains entières pour essorer son gant et l’imbiber d’une eau nouvelle. Il tapotait la peau du jeune homme, gardait son regard miel fixé sur ce visage abîmé, et répétait le même geste inlassablement pour le débarbouiller et lui redonner forme humaine.
Parfois, Walid laissait entendre un petit gémissement de douleur et Nans, consciencieux, réduisait la pression sur sa blessure. Il prenait le temps de ne pas lui faire mal, de ne pas aggraver sa souffrance… C’était là une manifestation concrète de la confiance et de l’affection qu’il lui portait.

Walid était de trois ans son cadet. Avec le temps, en plus d’être son collègue et celui qui lui avait offert un travail durable, il était aussi devenu son petit frère. Une amitié les liait désormais ; du moins, c’était ce que pensait Nans, assez terre à terre et pragmatique avec ces choses là. Les sentiments étaient pour lui un mystère ; une parcelle de la vie qu’il n’était jamais parvenu à élucider. Il faisait de son mieux, et c’était sans doute suffisant.
Deux ans plus tôt, il avait sorti ce jeune homme d’un faux pas. Dans un habit léger, le garçon titubait dans les rues malfamées de Woestan, vêtements déchirés, visage émacié, roué de coups. Il y avait comme un écho au passé, dans cette situation qui se répétait, et cela leur faisait tout drôle. Le temps avait coulé sous les ponts, depuis.
À l’époque, Walid était sonné, à deux doigts de tomber dans les pommes. Certains l’avaient ignoré et avaient préféré passer leur chemin. Nans, lui, de sortie ce soir-là, vagabondant dans cette ville qui l’avait vu naître et sombrer, avait trouvé bon de s’arrêter.
Quelques années plus tôt, lui-même avait été secouru par un passant, alors qu’il était dans un très mauvais état : le marché de la drogue est une chose dangereuse. Dénoncer ses participants aux portes de la condamnation lui avait valu une vengeance terrible à sa sortie de prison ; ils lui étaient tombés dessus à quatre et n’avaient fait qu’une bouchée de lui en le prenant par surprise. Sans cet homme, ce jour-là, il serait mort. Il n’avait jamais eu l’occasion de le remercier et son visage s’était effacé de sa mémoire… Mais, quelque part, en venant à son tour en aide à ce garçon à la gueule cassée, il lui avait rendu hommage. Après tout, sans ce passage à l’hôpital, il n’aurait jamais rencontrer Monsieur Nasab… Comme quoi, les chemins qu’empruntait la vie étaient souvent semé d’imprévus et d’embûches…

Cette fois-là, Nans s’était occupé d’un parfait inconnu. Peut-être n’avait-il pas été doux. Peut-être lui avait-il fait mal… Walid n’en avait gardé aucun souvenir ; il s’était endormi dans la foulée, assommé par la fatigue. Peu après cet épisode, ils avaient gardé contact et s’étaient surtout recroisés  par pur hasard, plusieurs fois… Le woestanais était à cette époque désœuvré, revenu de Rykaarde en urgence, vivant sur de maigres économies qui s’épuisaient à la vitesse de l’éclair. La vie lui semblait être un éternel renoncement. La misère lui retombait dessus inlassablement et refusait de le lâcher… Walid avait été ce Nasab de ses vingt ans ; celui qui lui avait ouvert d’autres portes, celui qui lui avait fait toucher du doigts d’autres possibilités.
Le monde de la prostitution, Nans ne s’y était encore jamais intéressé. Il en avait entendu parler quand il était encore enfant, mais alors trop petit, il n’avait pas tout saisi. Walid l’avait pris par la main, lui avait présenté son métier.
Seulement âgé de vingt-trois ans, le jeune homme avait déjà tout fait. Il était embauché dans une maison d’escort et de plaisir. Les agents pouvaient choisir entre ces deux options, et, dans certains cas, cumuler les deux pour gagner plus d’argent. C’était un travail comme un autre ; la connaissance, c’était le corps. Pas de diplôme nécessaire, juste le courage de s’offrir à des inconnus.
Si Nans avait d’abord pensé ce métier immoral et honteux, lorsque l’argent était venu à manquer, il avait cédé à l’appel de la fin et à la peur de retomber dans une pauvreté morbide.
Les fois où il était venu chercher cet ami escort à la porte de son entreprise, les managers l’avaient déjà remarqué. Après tout, Nans n’était pas du genre à passer inaperçu. Sa taille immense, son regard perçant, ses longues locks qui battaient son dos taillé en v lui donnaient une prestance peu commune. Posséder un escort pareil serait sans doute un véritable avantage. Le grand patron, petit homme boursouflé, particulièrement répugnant, n’avait donc pas chercher des noises à cette nouvelle recrue et l’avait acceptée sans la moindre protestation : une aubaine.

D’abord, Nans s’était contenté de jouer son rôle d’escort. C’était un exercice difficile, auquel il avait mis du temps à s’habituer. En s’engageant dans cette drôle de profession, il avait oublié un détail très important : escort, c’était du physique, certes, mais c’était aussi du social. Il fallait être à l’aise avec les clients pour les satisfaire. Leur faire passer une soirée inoubliable ou passer à la perfection pour leur fiancé : chose complexe pour un homme aussi introverti et taciturne que Nans.
C’était encore une fois Walid, ce cher Walid, qui lui avait tout appris. Jouer un rôle, répéter tous les soirs la même partition pour paraître à son aise jusqu’au bout était possible après un bon entrainement. Nans avait intégré ce personnage comme pour  jouer une pièce de  théâtre… Il avait appris son rôle par cœur, ses répliques à la perfection, et en était même venu à se faire passer pour un jeune homme bon vivant, ouvert et sympathique aux yeux de ses clients… 
Cette couverture, qui au premier abord pourrait paraître contraignante, lui apporta pourtant une assurance et un sentiment de sécurité qu’il n’avait jamais eu auparavant. Il lui suffisait de se mettre sur le mode « pilote automatique » et les soirées passaient toute seules… Plus besoin d’éprouver, de ressentir, de se forcer. Les rencontres étaient nombreuses, fluides, appréciées, et c’était bien là le principal.

En peu de temps, Nans était devenu l’escort phare de l’entreprise. Un succès qu’il devait en grande partie à son physique original, à son visage typique qui devait sans doute faire partie du folklore austréen. Les femmes qui le rencontraient tombaient pour la plus appart sous son charme… Des hommes étaient aussi venu le demander, mais il avait rejeté toutes leurs requêtes ; bien que nécessiteux, le jeune homme refusait de s’abaisser à une telle chose et éprouvait beaucoup de difficulté à comprendre Walid qui, lui, ne faisait aucune différence de genre entre ses clients.
La vie, avec ce métier, fut plus facile. L’argent inonda Nans comme jamais auparavant, et il finit par y prendre goût. La chambre de bonne, sous les toits d’un vieux bâtiment des quartiers pauvres,qu’il louait jusqu’à présent, fut troquée contre un petit appartement aux allures de studio, plus spacieux, plus confortable… Il lui semblait vivre un rêve éveillé.
Si au début, le jeune homme s’était promis de ne pas se reposer sur ses lauriers, il arriva un moment où se sentit tout à fait en sécurité au point d’oublier que la fortune était passagère et que la chance changeait plus souvent d’âne qu’à son tour.
Désormais bien décidé à profiter de la vie et des nouvelles possibilités qui s’offraient à lui, Nans finit pas céder aux demandes de son patron qui l’encourageait à prendre également de petits contrats de nuit. Les formules soirées et nuits entières payaient bien plus que le simple travail d’escort. Lorsqu’il s’agissait d’offrir son corps, de se donner entièrement au client, les prix s’envolaient. C’était bien là un système pervers, mais qui semblait logique à cet homme déjà engagé dans le milieu, embourbé jusqu’aux genoux et pas prêt de s’en sortir.

Les femmes qui achetaient ses services étaient pour la plupart de riches bourgeoises austréenne. Mariée jeunes à des maris plus vieux ou parfois tout simplement inintéressants, elles avaient des profils variés. Certaines étaient encore des enfants. La vingtaine, prisonnière du carcan marital mais désireuses d’explorer leur sexualité librement. Elles se cachaient, demandaient une discrétion à tout épreuve que Nans, enfermé dans son rôle, avait appris à leur promettre. D’autres, plus vieilles, transgressaient ces interdits qui leur avaient été inculqués dès leur prime jeunesse et vivait une existence d’excès et de joies condamnables dans le dos de leurs maris occupés par leurs affaires.
Toutes avaient besoin d’amour. D’un amour sans limite, presque passionné, même s’il était feint. Les caresses, souvent, leur procurait un plaisir peu commun ; elles aimaient se sentir regardées. Se sentir belles dans les bras de ce jeune homme qu’elle payaient pour être flattées. Et Nans, conscient de ce désir silencieux, accord tacite entre cliente et ouvrier, faisait tout son possible pour les satisfaire et leur offrir un souvenir agréable qui les ferait sans doute revenir.
Il connaissait le nom de certaines et avaient ses préférées. On parlait de lui comme d’un amant sympathique, doux, attentionné. Un spécialiste qui savait mener n’importe quelle femme jusqu’au septième ciel… Nans, avant de s’engager dans ce métier, avait déjà eu quelques expériences. Du temps de ses années à Rykaarde, les histoires légères s’étaient accumulée alors qu’il rêvait de sérieux, alors qu’il fantasmait sur le corps délicat, athlétique de Maryam. Mais, sa toute première fois, elle s’était faite avec une dealeuse. Histoire sans lendemain qui lui avait permis de comprendre et d’explorer son propre corps à un âge étonnamment avancé pour un jeune homme de son genre.
Depuis, Nans avait appris à différencier amour et sexe. Passer une nuit avec une inconnue ne le dérangeait en rien ; il s’y était habitué.
Lorsque sa partenaire lui plaisait, tout était fluide. L’acte se passait le plus naturellement du monde ; il obéissait à ses demandes, faisait de son mieux pour lui donner le plaisir qu’elle avait acheté, et la laissait repartir en espérant la revoir. Néanmoins, les femmes plus vieilles ou celles qui n’avaient aucun charme à ses yeux l’amenait à prendre quelques pilules pour se donner du courage. C’était devenu une habitude, les rouages d’un travail complexe et déshumanisant auquel il avait finit par s’accommoder.  

Certaines, une fois à l’aise et satisfaites du service, avaient ce besoin de jacasser pour détendre l’atmosphère. Blotties contre ce torse rassurant, elles s’épandaient en ragots la plupart du temps inutiles et inintéressants, mais d’autres fois très étonnants, valant la peine d’être écoutés. Des secrets bien cachés venaient parfois jusqu’aux oreilles de ce jeune homme aux mœurs déridées. Certains touchaient l’état, d’autres de grandes célébrités adulées à Salva. Il était venu des fois où Nans, au sortir d’une nuit avec une jeune femme, avait pensé à monnayer quelques informations auprès d’un journaliste peu scrupuleux comme il y en avait beaucoup dans le domaine… Mais il se souvenait de sa promesse, de son vœu de discrétion et des foudres qu’il s’attirerait de la part de son patron. Alors, il se retenait, préférant conserver une cliente plutôt que de la perdre pour quelques liasses de billets supplémentaires.

À trop jouer avec le feu, il n’était pas rare de se brûler les ailes. Nans en était conscient ; sa vie était pavée d’exemples et de démonstrations. Il ne désirait pas retomber dans une situation précaire et préférait rester prudent.

Rohann Brooke
Rohann Brooke
Pas de compétences
Would I do it again ? ▬ Nans  Miniature_725_SLWould I do it again ? ▬ Nans  Ponyta12Would I do it again ? ▬ Nans  4cTePF2B
Would I do it again ? ▬ Nans  XX9osQbdWould I do it again ? ▬ Nans  Oeuf_s12
Pokédollars : 141
Would I do it again ? ▬ Nans  Miniature_Badge_Roche_RFVF
Inventaire : - 1 Total Soin
- 1 Capstick
- 1 Pokéball
- 1 Holokit
- 1 Pierre Stase
- 1 Couveuse
Would I do it again ? ▬ Nans  Miniature_Badge_Roche_RFVF
Rohann Brooke
Apprenti Ranger
Jeu 25 Juin - 12:52   
Aaaah mais voilà le petit Nans, ça se concrétise cette histoire ! blush

Bien évidemment je connais déjà pas mal de choses le concernant, mais tu as décidé de faire la cachottière cette fois-ci donc ... j'ai hâte de découvrir ce qu'il se cache derrière les zones d'ombres que tu m'as laissé toimêmetusais Le +1 me paraît bien obligatoire, j'espère que tu n'auras pas à dépasser sur mon message pour gratter encore quelques lignes de texte. Tu en es tellement capable. sick

En tout cas, j'ai hâte de faire débarquer Jamie pour sillonner avec toi les chemins de la bromance ~ heart 2
Lucie Helm
Lucie Helm
Pas de compétence
Would I do it again ? ▬ Nans  Verpom10Would I do it again ? ▬ Nans  Miniature_755_SLWould I do it again ? ▬ Nans  Miniature_492_Terrestre_XY
Would I do it again ? ▬ Nans  Mucusc10Would I do it again ? ▬ Nans  Dimocl10Would I do it again ? ▬ Nans  Miniature_602_XY
Would I do it again ? ▬ Nans  Oeuf_s13Would I do it again ? ▬ Nans  Oeuf_s13Would I do it again ? ▬ Nans  Oeuf_o11
Would I do it again ? ▬ Nans  Oeuf_o11
Pokédollars : 63
Would I do it again ? ▬ Nans  Miniature_Badge_Roche_RFVF
Inventaire : - 1 Masterball
- 2 Potions
- 1 Total-Soin
– 1 Jeton Chance
- 1 Obj. évolution
- 3 dés d'or
- 2 super-repousses
- 2 couveuses classiques

- Pass Boîte PC
- Pokédex de Salva
Would I do it again ? ▬ Nans  Ruban_13Would I do it again ? ▬ Nans  Ruban_10Would I do it again ? ▬ Nans  Ruban_12Would I do it again ? ▬ Nans  Ruban_14
Lucie Helm
Chercheuse
Jeu 25 Juin - 13:04   
Re-bienvenue :3

Voila le fameux Nans, le feat et l'avatar sont bien classes, comme d'habitude ~ Pas de pokémon de départ ? L'idée ne m'avait même pas traversé l'esprit ! Je me demande ce qui va ne être pour l'histoire moustachu

Bon courage pour la suite ~ On se retrouvera inrp sans doute love it
Sarah Dusk
Sarah Dusk
Apprentie Scientifique
Would I do it again ? ▬ Nans  Miniature_147_XYWould I do it again ? ▬ Nans  Miniature_037_Alola_SL
Pokédollars : 161
Would I do it again ? ▬ Nans  Miniature_Badge_Roche_RFVF
Inventaire : - 2 Potions
- 1 Total-Soin
- 2 repousses
- 6 super-repousses
- 1 jeton famille
- 4 dés d'or
(- 1 Masterball)
- 3 Superballs
- 1 Charme Chroma
- Pokédex
- Portable
- Jeton DC
Would I do it again ? ▬ Nans  Ruban_11
Sarah Dusk
Apprentie Scientifique
Jeu 25 Juin - 14:29   
*a vérifié la page zerochan de la base avant de poster* Waouh 0.0 Déjà tant de classe dans ce début de fiche thank uuuu
Décidément, tu nous gâtes avec tes petits gars romantic J'ai super hâte de lire la suite de sa fiche heart1
Andrea Saadauri
Andrea Saadauri
Pas de compétences
Would I do it again ? ▬ Nans  Miniature_677_XYWould I do it again ? ▬ Nans  Miniature_774_Orange_SL
Pokédollars : 61
Would I do it again ? ▬ Nans  Miniature_Badge_Roche_RFVF
Inventaire : - 1 Pokéball
- 2 Potions
- 1 Total Soin
Would I do it again ? ▬ Nans  Miniature_Badge_Roche_RFVF
Andrea Saadauri
Étudiant en Astrophysique
Dim 28 Juin - 11:30   
Aww blush Merci beaucoup pour cet accueil triomphal ~ Nans est fort ravi eheheh

Sysy : Sincèrement hier je me suis dit "tu vas quand même pas déborder sur sa réponse, si…?". Je suis navrée.

Lulu : Contente que le vava te plaise ~ et oui, pas de pokémon ! Nans va devoir combattre à mains nues c'est faux. Vive les repousses ! Victoire

Sasa : Et t'es toute mimi golden heart j'espère que le perso vous plaira ~
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