La main devant tes yeux pour t'en servir comme d'une visière, tu observes l'azur qui prédomine loin, si loin au dessus de toi. Cet endroit est magnifique, tu dois bien l'admettre Oz. Mais... Il est aussi chaud, très chaud. Un peu trop chaud pour toi, habitué du climat bien plus tempéré, presque froid de Winscor. Tu as une sainte horreur de l'étuve dans laquelle tu te trouves et au plus vite, tu cherches un endroit où te réfugier. Tu n'es arrivé qu'hier, Ozymandias, dans la douce soirée aussi tu ne t'attendais pas à cela et tu ne connais pas encore les lieux. Ton sac est rempli d'informations diverses que le centre Pokémon t'a fourni sur le pays et tu brûles de l'envie de dévorer cet amas de connaissance mais si possible, sans calciner à ton tour. Au loin, tu repères une terrasse bondée. Un café ? L'endroit parfait pour ta première halte, déjà si tôt dans la journée. Oz, tu n'es qu'un incapable ? Comment ta véhémence peut se tarir si vite, à la première difficulté ?

En réalité, ton effervescence est bien là, plus présente que tu ne l'aurais soupçonné initialement. Tu marches sur ses pas, tu connais le monde qu'il a connu autrefois. Et cette simple pensée te donne l'hardiesse nécessaire à progresser sur cette voie dont tu ignores absolument tout. Tu t'y connais en pokémon, bien évidemment et Off a souvent combattu à tes côtés. Mais jamais tu n'aurais pensé en faire ton avenir. Son avenir. Tu te perds un peu, Oz. Quoi de plus normal, après tout ? Car depuis ton arrivée, ta liesse s'est teinté d'une crainte, légère, pernicieuse. Fais-tu vraiment le bon choix ? Comprends-tu réellement tous les enjeux de ta résolution ? Car tu t'aventures sur le monde d'Emil et maintenant, tu commences à avoir peur de ce que tu vas découvrir. Peur de réaliser à quel point tu étais loin de comprendre la souffrance qu'il avait pu endurer ici. Peur de découvrir que peut-être, tu ne le connaissais pas si bien que tu ne le pensais. Peur de comprendre que son entrée dans ta vie n'était qu'une passade, une façon de s'occuper en attendant de repartir chez lui. Peur d'apprendre qu'une vie l'attendait, ici. Peur...

Les rouages de ton esprit se sont mis en marche, Ozymandias. Tu les entends ? Cette dissonante symphonie, ce grincement strident qui ronge ton esprit ? Tu n'as pas les idées claires, comme souvent depuis son décès. Et parfois, tes peurs te sautent à la gorge, comme autant de lames empoisonnées prêtes à taillader ta chair, à lacérer tes os et à déchiqueter ton âme même. Tout s'obscurcit autour de toi et tu n'arrives pas à formuler une seule pensée cohérente, tu plonges profondément dans un puits emplie d'une lie épaisse et noire, répugnante et repoussante. Tu sens qu'elle t'enlace, Mania et sa folie démente, qu'elle insinue en toi son doux venin. Soudain, un choc te ramène de force à la raison, une chance car tu le sais, Oz. Tu n'étais plus très loin de sombrer, les larmes à la commissure de tes yeux n'allaient pas tarder à rouler le long de ta peau claire.

Tu comprends que sans même t'en rendre compte, trop absorbé par tes idées noires, tu étais en train de te diriger vers ce café que tu as vu plus tôt. Et que comme un grand idiot, tu es entré dans quelqu'un. Rapidement, tu essuies du revers de la main les gouttes de ta perdition, tu balbuties une excuse et tu t'avances jusqu'à une table heureusement libre. Pas très loin d'une ventilation, qui plus est. Là, tu t'installes et rapidement, un serveur vient prendre ta commande. Dans ton esprit, le premier de tes réflexes est de demander un chocolat, mais il n'est plus là pour le boire. Alors tu ne commandes qu'une boisson pour toi, un café, désaccord avec la température extérieure mais tu espère que l'amertume te tirera une fois pour toute de ta torpeur mélancolique. Une fois l'homme parti -tu es tellement préoccupé que tu ne peux même pas vraiment affirmer qu'il s'agit d'un homme-, tu plonges la main dans ton sac à tes pieds et tu en sors une photo, abîmé par le temps et troué de toutes parts, preuve qu'elle a régulièrement était changé de place et épinglé de tant de façon différente au fil des ans. Une photo de lui et de toi, sur la grande roue de Winscor. C'est idiot, mais tu arrives à trouver un peu de réconfort en l'observant. Tu prends une grande inspiration en fermant les yeux, pour apaiser ton cœur encore secoué de ta mésaventure passé. Tu gardes les yeux fermés encore quelques instants, pour continuer de focaliser ton attention sur des pensées autres que celles qui peuvent te dévorer. Tant et si bien que tu ne réalises toujours pas, Ozymandias, que tu es dans un lieu public très bondée et que ta tranquillité risque de ne pas durer éternellement. Après tout, tu occupe une table de quatre à toi seul, ne t'étonnes pas si d'autres viennent s'installer là.

Tu observes, presque avec horreur, cet inconnu qui vient s'installer juste en face de toi, sans même attendre une réponse de ta part. Ton visage reste ce même miracle d'impassibilité, que l'on pourrait presque prendre pour de l'ataraxie. "Non, tu peux pas." Voilà ce que crie ton esprit, mais aucun son ne s'échappe de tes lèvres face aux flots de paroles qui s'ensuit. Est-ce que ce serait cela, ta plus grande épreuve ici, Oz ? Réussir à devenir un brin plus sociable ? Une tâche bien complexe, pour toi qui est si habitué à posséder ce physique, ces atours particuliers qui poussent les gens à t'éviter. Mais pas ce jeune homme, que tu constate être plus jeune que toi. Est-ce si évident que cela de constater que tu viens de Galar ? Ton accent de quand tu as bredouillé une excuse tout à l'heure, peut-être ? C'est vrai qu'Emil t'a toujours dit que ton accent te rendait clairement identifiable, mais à ce point ? "J'ai pas senti grand chose non plus, j'étais absorbé dans mes pensées." Tu expliques, mais tu ne t'excuses pas, Oz. Tu l'accueilles déjà à ta table, il ne faut pas trop t'en demander non plus. Tu prends une grande inspiration pour ne pas trahir un profond soupir et tu plantes tes yeux dans les siens, comme pour le jauger, l'interroger. Tu n'éprouves aucune gêne à observer longuement une personne, tu prends toujours le temps d'observer le regard des autres, révélateur, à ton sens, de tant de choses sur une personne. "La conversation, c'est pas trop mon truc. Mais si ça te fait pas peur, fais toi plaisir." Tu croises les bras et te renfonce un peu plus sur ton siège, la mine renfrognée. Ce n'est pas tant que tu éprouves une haine viscérale pour cet inconnu, plus que tu ne pensais vraiment pas discuter avec quelqu'un aujourd'hui. Et ton individualisme ne t'a pas préparé à une telle épreuve.

Tu réalises parfaitement que ta voix est froide, que tes manières sont distantes et renfermés, que tu ne dégages absolument pas l'énergie communicative des bavardages amicaux et anodins. Et tu en viens presque à regretter d'agir ainsi, de te laisser ainsi aller à tes bas-instincts. Alors, tu décroises les bras. Tu ne t'approches pas plus de la table, il ne faut quand même pas trop t'en demander, Ozymandias. Lorsque le serveur arrive avec ton café, la commande de ton compagnon de fortune te fait hausser un sourcil. Un mojito ? Mais il te semble bien jeune pour cela, et rien dans son physique ne te donne l'impression qu'il soit de ces adolescents que tu croisais parfois à Winscor, qui tiennent plus de l'épave que de l'être humain, habitué à tout ce que l'humain fait de pire et ce depuis bien trop longtemps, proportionnellement à leur âge. "Un mojito ? T'es pas un peu jeune pour ça ?" Ta question vient de but en blanc suite à sa commande. Tu ne te soucies pas trop des conséquences d'une telle demande, ni des réactions d'autrui. En fait, tu n'y a même pas réfléchi, n'est-ce pas ? Tu n'as pas vraiment de filtre social et tu as tellement l'habitude de te moquer royalement des regards médisants et des paroles acerbes que l'on peut t'adresser que tu ne comprends pas que tu peux mettre quelqu'un dans l'embarras. Quand au risque de le vexer... En temps normal, tu es plus précautionneux. Mais pas là. Et tu ne le regrettes pas quand la conversation commence à tourner autour de tes piercings.

Tu ne peux retenir un léger soupir agacé. Tu préfères quand tes petits artifices font fuir les gens plutôt que d'attiser leurs curiosités. Et il te montre sa boucle d'oreille ? Mais qu'espère-t-il de toi, Oz ? Que tu te sentes envahi d'une bouffée de générosité et d'enthousiasme ? Bon, au moins, tu en sais un peu plus sur cet un-peu-moins inconnu. Il ne vient pas d'ici mais d'Alola. Il n'aime pas les piercings. Il trouve que ton accent est fort. Tu n'es pas son premier galarien. Il aime pas les piercings. Et mine de rien, il te fait bien comprendre ce que tu redoutais déjà. Ton intégration à Salva va être très compliqué. "Peut-être que les galariens ont juste très bon goût ?" Tu apportes ta tasse à tes lèvres et déguste ce café, une petite gorgée dont l'amertume fait tressaillir ton esprit. Sérieux, à quel point un café galarien est différent d'un café du reste du monde ? Tu t'attendais à tout, mais pas à ce goût là. Tu déposes la tasse et constate que sur la table, pas très loin de toi, trône toujours la photo que tu n'as pas rangé suite à cette arrivée impromptu. Un peu plus précipité que la normale, tu récupères ton bien que tu mets délicatement dans ta poche. Tu ne veux surtout pas prendre le risque de l'abîmer, mais tu n'as pas envie que l'attention de ton interlocuteur se pose sur ce sujet précis. Certes, il ne vient pas de Salva et pourrait être plus compréhensif, mais... Tu n'es pas sûr d'avoir envie d'aborder un tel sujet, Oz. "Et c'est pas trop cliché pour un natif d'Alola, tous ces bracelets ?" Tu tentes de diriger rapidement la conversation sur un sujet que tu pourras maîtriser. Ou plutôt sur une réplique à "l'assaut" subi un peu plus tôt. Visiblement, Ozymandias, tu es du style rancunier, au moins un peu. "Tu as l'air d'être là depuis plus longtemps que moi... C'est autorisé de fumer en intérieur, ici ?" Une demande anodine qui te taraude depuis un certain temps. Là, tout de suite, tu allumerais bien une cigarette, sans raison. Belle addiction.

Tu observes les bracelets à son poignet, un brin intrigué. Rien de bien merveilleux, dit-il ?Pourtant, l'état délabré de ces breloques ne te trompent pas sur l'importance qu'elles ont pour lui. Tu le sais parfaitement Oz, car tu sais que toi aussi, tu conserveras ses souvenirs aussi longtemps qu'il te le sera possible. Tu n'attends pas une seconde de plus pour sortir ton paquet de cigarettes et ton briquet. Tu en allumes une que tu amènes à tes lèvres, véritable panacée à ton anxiété. Puis tu laisses le paquet le briquet en évidence sur la table, accompagné d'un regard à ton interlocuteur assez compréhensible. Oz, deviendrais-tu un peu plus accommodant, plus agréable ? Certes, tu ne pousses pas le vice au point de proposer sciemment du tabac, mais tu laisses le paquet à disposition ainsi qu'un briquet. Bravo, vraiment. "Je suis arrivé hier, dans la soirée." Et voilà même que tu te lances dans la conversation, désormais. Décidément, rien ne t'arrête, toi. Tu es presque fier d'un tel accomplissement, fierté teinté d'un regret indicible. Car si depuis plus de cinq ans, tu faisais des efforts, c'était pour Emil, n'est-ce pas ? Durant ces six derniers mois, tu t'étais éteint, comme si celui que tu avais pu être n'avait jamais réellement existé. Et maintenant que tu sembles t'éveiller, ta première pensée, ta première réflexion, c'est comment Emil réagirait de te voir ainsi. Ironique, n'est-ce pas ?

"On m'a... On m'a pas mal parlé de Salva, ouais. On m'a bien dit qu'ici, c'est assez différent,de Galar, ou même d'Alola. On m'a aussi bien fait comprendre que je suis à l'opposé de tout ce qui se fait ici." Tu prends un temps d'arrêt, frappé d'un amusement mélancolique. Oz, tu deviens de plus en plus nostalgique, à l'image de ces personnes âgées qui ne sont bon qu'à radoter sur le bon vieux temps. Après qu'Emil se soit confié à toi sur sa vie ici, vous en discutiez de plus en plus fréquemment et un jour, avide de toujours lui apporter un large sourire et inquiété par l'idée que son pays pourrait lui manquer, tu lui avais proposé de partir vivre là-bas. Son regard interloqué, ou son fou rire ? Tu ne sais plus ce qui t'avait le plus amusé, mais tu te souviens parfaitement de ce qu'il t'avait rétorqué. "Mon pauvre, t'es soit fou amoureux, soit complètement taré. Rien que toi seul vivant là-bas, je peux pas me l'imaginer." Il s'approche de toi, dans une vaine tentative de calmer son éclat de rire et dépose un baiser sur ta joue. "En fait si, j'imagine plutôt bien. Tu en chierais pour trouver un appart'. Tu y arriverais quand même, mais tes voisins risqueraient de te détester et te ferait la misère, t'a pas idée. Et ensuite, un jour en rentrant tard le soir, tu te ferais tabasser et personne se bougerait pour toi." Il t'enlace tendrement et dépose un nouveau baiser, sur tes lèvres cette fois. "Après, libre à toi d'y aller, je te suivrais. Si c'est avec toi, je pourrais même mourir." Cette phrase t'avait fait sourire à l'époque. Maintenant, elle te donne simplement envie de pleurer.

Avoir repensé à cet instant t'a totalement perdu. Tu notes juste qu'il parle du café, alors tu hoches de la tête tandis que le serveur le récupère sur ton plateau. Finalement, peut-être que là il t'aurait fait le plus grand bien, ce café beaucoup trop puissant pour ton palais. Tu hoches la tête, encore un peu pensif. Et, perdu dans cet état semi-végétatif, tu réalises que ton esprit vagabonde de pensée en pensée. Il t'a dit qu'il était là depuis trois ans et qu'il retournait à Alola pour les vacances scolaire. Un étudiant ? "Et t'es venu ici pour quoi ?" Tu comprends enfin, Oz. Pourquoi les gens pouvaient aimer discuter avec autrui. Car ainsi, ils peuvent focaliser leur attention sur autre chose.

Des études pour devenir Ranger... Tu es assez impressionné, Oz. Car de ce que tu sais de cette vocation, c'est qu'elle nécessite des prouesses physiques intenses, bien plus intenses sans doute que ce que tu pourrais fournir. Tu ne connais pas comment fonctionne le cursus, mais savoir qu'il en est à sa dernière année t'aide à visualiser un peu plus aisément son âge. Il doit avoir dans la vingtaine, à peine plus sans doute ? Tu continues de l'écouter, opinant légèrement pour montrer qu'il a encore toute ton attention. Tu prends donc note de la ville que tu aimerais visiter en dernière, si cela t'es possible. Une chaleur terrible ? Très peu pour toi, Oz. Puis vient le moment où il te parle de la vie à Salva, que ce n'est pas si terrible que cela, que peut-être, on t'a exagéré les faits. Cela te fait arquer un sourcil de surprise. Oui, tu viens seulement d'arriver ici Ozymandias. Mais tu connais les lieux par Emil, qui t'a beaucoup parlé de ce qu'il avait vécu ici et clairement, le bonheur était souvent absent de ses récits. Mais bon, qu'est-ce que cela peut te faire ? Tu n'as qu'à l'ignorer.

"La personne qui m'a parlé de Salva a passé vingt ans ici et il m'a parlé plus fréquemment de mauvais côté que de bons." Tu n'as pas pu t'en empêcher, Oz. C'est comme si ce type était en train de salir quelque chose à propos d'Emil. C'est stupide, puéril de penser ainsi. Mais tu ne peux pas te contrôler, pas vrai ? "Ok, quand il a vécu dans cette ville, c'était moins pire, mais il n'était pas vraiment libre de vivre comme il l'entendait. Et rien que ça, finalement, c'est quelque chose d'horrible, nan ? Sauf si en cinq ans, les mentalités auraient fait un monstrueux bond en avant." Tu t'arrêtes un instant et tu observes l'extérieur. Franchement, tu prends pas ça trop à cœur ? Calme toi un peu, il ne faisait que parler. Tu baisses un peu le ton avant de reprendre. "Après, il vivait en Septrion. Ça n'a pas du contribuer à ses bons souvenirs." Tu t'étais un peu renseigné sur internet avant de venir et partout, tu pouvais lire que les mentalités dans le nord était plus arriéré que dans le sud. Donc tu ne prends aucun risque à dire cela, encore moins à un étranger, non ?

Avoir tant parlé, Oz, te rappelle plusieurs souvenirs. Ton esprit commence à vagabonder, ramené de justesse à la réalité par l'arrivée du serveur et de son pancake. Tu n'as absolument pas faim. Tu as rarement faim ces derniers temps et généralement, quand il fait un peu trop chaud à ton goût, c'est encore pire. Alors tu te contentes d'observer la scène qui se déroule sous tes yeux. Il semble vraiment proche de son pokémon, cet Aru. Un Rattata, comme tu n'en as jamais vu... Peut-être vient-il de sa région d'origine ? Tu manques cruellement de connaissance sur ce domaine, Oz, c'est édifiant. "Moi, c'est Oz." Ton visage ne sourit pas, non pas que tu ne le désire pas, mais sourire de manière naturelle chez toi, c'est assez compliqué, pas vrai ? "Et je viens ici pour débuter en tant que dresseur, au fait." Tu viens seulement de réaliser que tu ne lui avais pas répondu, parce que tu t'es emporté comme un demeuré. Si tu devais avoir une note pour ta sociabilité Oz, ce serait certainement un F.

A sa phrase, son ton, ses intonations, tu comprends que tu as fait une erreur, Oz. Tu t'es emporté trop vite, pour une raison tellement personnelle et intime que même toi, tu viens à douter de sa légitimité. Tu le sais, c'était stupide comme réaction. Tu n'as pas pu te retenir, c'est idiot mais c'est ainsi. A toi maintenant de rectifier le tir et de te montrer plus agréable. Plus agréable, Oz. C'est drôle, pas vrai ? Tu te sens un peu embarrassé de ton propre comportement et de ce que cela a impliqué pour la personne en face de toi, à tel point que tu ne parviens à peine à lui répondre. Tu acquiesces, tu l'observe pendant qu'il te parle. Il a buté sur un mot, mais impossible de savoir vraiment ce qu'il a voulu dire. Et vu ta gêne actuelle, tu fais mieux de ne pas te lancer dans l'analyse, pas vrai ? Sois un peu plus discret. "Je vais essayer de faire ça. Après, je pense que c'est difficile de ne pas appréhender aux prémices d'un voyage pareil. Ça ira sans doute mieux d'ici quelques temps." Une belle esquive. Si on sait lire entre les lignes et surtout si on te cerne assez bien, Oz, on peut comprendre que, l'air de rien, c'est une façon de reconnaître que tu es allé trop loin. Mais vraiment, c'est très bien dissimulé. Il serait peut-être temps de te montrer un peu plus à cœur ouvert, Oz.

D'ailleurs, il faut croire que c'est le meilleur moment pour cela, car Aru enchaîne directement avec la question, la fameuse question, que tu aurais préféré éviter à tout prix. Et tu as déjà gâché ta carte de l'agacement sans raison, Oz. Pas de chance, toi qui te met petit à petit à améliorer tes interactions sociales, voilà que l'on te plonge dans la fosse au lion. Tu prends une grande bouffée de ta cigarette et tu jettes un regard dehors. Que fais-tu, Oz ? Est-ce que tu en parles ? Est-ce que tu mens ? Non, tu ne mentiras pas, tu le sais. C'est pour Emil que tu fais ce voyage, si tu viens à le cacher, ce serait lui manquer de respect. Mais tu n'arrives pas à savoir si tu es déjà prêt à en parler. Tu t'en rends compte, Ozymandias ? Tu n'as jamais parlé de cela à quiconque pour l'instant. Il est peut-être temps de commencer à alléger ton esprit. "C'est... Un peu des deux ?" Ton regard se porte de nouveau sur Aru tandis que ta voix s'est bien plus adouci. Comment expliquer calmement quelque chose comme ça, finalement ? "C'est la région d'origine d'une personne très importante. Il a préféré s'enfuir d'ici car il n'arrivait pas à vivre comme il l'entendait et il a déménagé à Galar, c'est comme ça que je l'ai rencontré. C'est pour ça que j'ai un avis tranché sur Salva, ce que je connais, c'est ce qu'il m'a raconté." Au début, ta gorge se noue et les mots sortent difficilement. Puis au fil des syllabes, ton débit devient plus calme. Jusqu'à ce que tu réalises une erreur de ta part. Oz, tu parles toujours de lui au présent. Tu as encore du mal à l'accepter, n'est-ce pas ? "Enfin, c'était son pays natal." Ta gorge se noue de nouveau, plus violemment cette fois. Non, c'est trop tôt pour réussir à en parler sans que cela ne te fasse du mal. Tu n'arrives pas à dire un mot de plus, tu prends une nouvelle bouffée de ta cigarette. Les larmes ne viennent pas, tu ne pleures pas à l'instant où tu parles de lui. Mais la tristesse, elle, t'accable et t'assaille de toute part. "C'est pour lui que j'ai choisi de venir ici." Il manque beaucoup de morceau à ton histoire, Oz. Tu t'en rends compte rapidement. "Il voulait devenir un grand dresseur pokémon quand il était enfant." Voilà. Ce n'est toujours pas la meilleure des explications, mais c'est déjà un peu plus précis.